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plus de peintres capables d’ordonner de vastes compositions ; surtout, il n’y avait plus de fresquistes, et, faute de peintres, les églises françaises de la Contre-Réforme restèrent sans décor. On tenta pourtant de remédier à ce défaut, et pour cela on dut faire appel à des artistes étrangers, à Flemael pour la coupole des Carmes, à Philippe de Champagne pour la Sorbonne, à Rubens pour le Palais du Luxembourg, à Romanelli pour l’hôtel de Mazarin et pour les chambres d’Anne d’Autriche au Louvre.

Ce fut alors une impérieuse nécessité pour nos artistes d’aller en Italie réapprendre cet art de peindre qui semblait perdu chez nous ; et bientôt nous aurons un Vouet, un Mignard, un Lafosse, cette nouvelle école française à laquelle on devra la coupole du Val-de-Grâce et celle des Invalides.

Malgré tout, les églises françaises seront peu décorées de peintures et produiront toujours une impression de grande nudité, et cette nudité est d’autant plus apparente que les Français n’adoptent pas le décor polychrome, le décor à l’aide de marbres variés et de dorures, si cher à l’Italie. Ils se contentent, pour les murs des églises et le décor sculpté, de la couleur grise de la pierre et de la maçonnerie.

Nous sommes habitués en France à cette froideur, mais les yeux qui ont vu la beauté italienne, et ceux qui n’oublient pas la beauté des églises gothiques, ne peuvent se résigner à une telle pauvreté. Nous acceptons pour la maison de Dieu une nudité dont nous ne voudrions pas pour nos demeures. Dès le début du XVIIe siècle, les étrangers s’étonnaient de cette absence de décor, et rien n’est plus caractéristique que cette opinion d’un ambassadeur d’Espagne à la cour d’Henri IV qui, en voyant la chapelle du château de Fontainebleau, disait qu’en France, il n’y avait que Dieu qui fût mal logé chez le roi.


II. Les Palais. — Nous ne nous attarderons pas aussi longtemps sur les palais et les constructions civiles, nous contentant de faire voir que par leurs traits généraux ils sont inspirés, comme les églises, des grandes idées directrices du milieu social. L’art perd sa grâce et sa parure d’ornemens ; il est un peu triste et très épris de grandeur. Salomon de Brosses, qui a été le grand architecte du début de cet âge, en a exprimé les pensées dans le Palais du Luxembourg comme il l’avait fait