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fort du feu. Mais il était démoralisé par la mort de Brunswick, par les échecs de son infanterie devant Hassenhausen et surtout par l’infractuosité des charges de sa cavalerie qu’il avait toujours jugée irrésistible. Il se résigna à prescrire une retraite sur Weimar par Auerstaedt. Le général Kalkreuth, avec ses deux divisions fraîches et sa cavalerie, resterait en position le plus longtemps possible pour couvrir le mouvement. D’ailleurs le Roi croyait la défaite réparable. Sans nulle nouvelle encore du prince de Hohenlohe, il ne savait rien de ce qui se passait aux abords d’Iéna, et il espérait livrer une seconde bataille en avant de Weimar, le lendemain ou le surlendemain, avec ses deux armées réunies.

La réserve de Kalkreuth (divisions Kuhnheim et Arnim, et 25 escadrons) ne tarda pas à être assaillie. Davout et ses soldats poursuivaient leur offensive avec un élan égal à la fermeté qu’ils avaient mise dans leur défensive. Ils voulaient avoir le plus qu’ils pourraient de l’ennemi. La division Arnim, formant la gauche prussienne à Gernstadt et au Nord-Ouest de ce village, est débordée par Friant et attaquée de front par Gudin. Elle cède le terrain en abandonnant 22 pièces de canon et est poursuivie jusqu’à Eckardtsberge. La division Kuhnheim, en position au Sud-Est de Gernstadt, est attaquée de flanc par Morand surgissant du vallon de Rehaussen, et, après une rude résistance, se replie avec une grosse fraction de la cavalerie. C’est au cours de ce terrible assaut que le général Dobilly fut tué d’un coup de mitraille. C’est là aussi qu’un soldat du 61e, nommé Péré et que ses camarades, sans doute à cause de sa ressemblance physique avec Napoléon, avaient surnommé l’Empereur, vit sa compagnie hésiter à gravir les rampes sous le feu ardent. Il se porta seul en avant, criant : « Mes amis, suivez l’Empereur, » et entraîna tout le monde. Ce trait, dit Davout, lui valut la Légion d’honneur et le grade de caporal.

Les Prussiens de Kuhnheim tentèrent de tenir dans Auerstædt. Mais Davout fit incendier le village à coups d’obus, et ils durent l’évacuer. Le combat cessa vers cinq heures. Le maréchal bivouaqua au milieu de ses troupes près d’Auerstædt en flammes.

Jusque vers cette heure-là, la retraite de l’armée de Brunswick dont les différens corps se repliaient sur Weimar, par Auerstædt, Reussdorf, Wiekerstedt, s’était opérée en assez bon