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Examinons de plus près toutes ces cultures : il en vaut certes la peine. Descendons et pénétrons sous les amandiers en fleurs.


Les amandiers prédominent dans toute la partie vaste de l’île qui s’étend au centre de Majorque, de Palma jusqu’à la Puebla et jusqu’à Felanix et Campos. Çà et là, des jardins d’oliviers, disposés comme ceux d’amandiers, continuent cette magnifique forêt clair ouverte ; çà et là, se mêlent aussi aux amandiers le feuillage sombre de quelques grands caroubiers ou les troncs gris cendré de quelques figuiers ; mais les oliviers et les figuiers s’étendent surtout ailleurs ; les oliviers, ce sont par excellence les arbres du pied et des premiers versans de toute la Sierra de l’Ouest : je les ai vus gravir la montagne jusqu’à l’altitude de 400 mètres ; les figuiers sont surtout cultivés dans la partie Nord et Nord-Est de la grande plaine centrale.

Tous ces arbres, oliviers, figuiers et amandiers, fournissent les récoltes de grande richesse : on exporte et l’huile, et les figues et surtout les amandes ; en l’année 1909, on a exporté de Majorque pour 15 millions de pesetas d’amandes (chiffre à peu près certain), et en l’année 1910 (chiffre un peu moins sûr) pour 18 millions. Mais ce n’est pas tout, ce sont là les récoltes de l’étage supérieur, suspendues à quelques coudées du sol ; il faut aussi compter les récoltes nourricières terre à terre de ces curieux « sous-bois » de cultures, céréales, légumes, pimens, pommes de terre ou fèves, qui souvent sont récoltes doubles dans l’année. Une récolte en haut et deux récoltes en bas : voilà tout ce que parvient à produire la terre précieuse de ces carrés ou rectangles dessinés par le damier des murs.

Moyennant quels travaux incessans et répétés ! Les branches des arbres sont comme lourdes des soins de très habiles arboriculteurs ; à leurs pieds, la terre retournée, bêchée, labourée, révèle partout l’effort dévoué des muscles humains. En promenant nos regards et nos pas sous les bouquets blancs qui forment dômes ou près de ces troncs contournés et noueux des olivettes qui racontent une si vieille et traditionnelle histoire de vie commune avec les hommes, nous contemplons les rangées impeccables des fèves, ou nous observons un tapis si régulier d’orges naissantes qu’on croirait étendue sous les rameaux feuillus ou fleuris une admirable « savonnerie » verte.