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Page:Revue des Deux Mondes - 1911 - tome 6.djvu/475

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précé- sont trop formels pour que nous ayons à craindre sur ce point une opposition qui ne saurait durer dès que nous aurons créé des tribunaux français. Certaines institutions internationales, issues de l’Acte d’Algésiras, sont maintenues : le temps les modifiera s’il y a lieu ; pour le moment, elles ne semblent pas devoir apporter une gêne bien sensible au fonctionnement de notre protectorat. Ce protectorat est donc né viable ; mais c’est à nous à le faire vivre, et nous n’avons pas l’illusion de croire que la tâche sera facile. Le traité vaudra ce que vaudront les mains chargées de l’appliquer.

Quant au traité congolais, nous avons peu de chose à ajouter à ce que nous en avons dit il y a quinze jours : il n’était pas encore signé alors, mais il était déjà connu. Nous avons dû faire des sacrifices considérables : ils n’ont pourtant pas donné satisfaction à l’Allemagne. L’exaspération qu’elle montre n’est pas sans nous causer de l’étonnement. Nous avons cédé, en effet, d’immenses territoires, composés sans doute de parties de valeur inégale, mais qui font masse et, par les prolongemens que l’on sait, donnent à l’Allemagne accès au Congo et à l’Oubanghi. N’est-ce rien que cela, et peut-on dire que l’Allemagne l’ait payé trop cher au prix d’un simple effort diplomatique ? C’est un bénéfice net qu’on apprécierait davantage si on tenait compte de ce qu’il nous a coûté à nous-mêmes ; mais on tient compte seulement de ce que nous sommes parvenus à en sauver et à en conserver. M. de Kiderlen nous avait d’abord demandé à peu près tout le Congo et le Gabon : l’opinion française a protesté avec une telle force qu’il a bien fallu transiger, et il est d’ailleurs à croire que les transactions finales entraient dès l’origine dans les calculs du négociateur allemand : dans tout marché, on demande plus pour avoir moins. Ce qui était difficile à concilier, c’étaient la prétention de l’Allemagne d’atteindre les fleuves et la résolution de la France de maintenir la continuité de son territoire congolais. On s’en est tiré approximativement, par des cotes mal taillées. La continuité de notre territoire a été rompue deux fois sur une étendue de quatre ou cinq kilomètres mais nous y avons conservé des droits de passage pour un chemin de fer. Au nord aussi, nous aurons le droit de semer en quelque sorte le territoire allemand d’une succession d’étapes où des territoires nous seront affermés au moyen de baux emphytéotiques, et nous rejoindrons parla le Bénoué. On traite volontiers ces concessions avec dédain et l’exercice des droits qui nous sont reconnus semble précaire, parce qu’il dépendra d’une tolérance allemande. Il ne dépendra pas d’une tolérance, mais d’un engagenient allemand qui, il n’y