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Page:Revue des Deux Mondes - 1911 - tome 6.djvu/555

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ce soit en réalité des notes et des sons, mais des notes écrites comme on ne les écrivait plus depuis deux cents ans, et arrangées avec un souci décoratif bien plus apparent que le souci musical. Voici enfin le XXVII, qui annonce les sectes vaincues, et partout, sous toutes les formes, la devise qui a dominé toute la vie vécue ici : NEC SPE, NEC METU… NEC SPE, NEC METU… Nous sommes bien chez Isabelle d’Este.

Mais nos tableaux y seront-ils ? Y ont-ils jamais été ? Charles Yriarte le croyait et avait fait un projet de reconstitution du Paradiso avec l’emplacement de toutes ces œuvres. Mais manifestement les panneaux de ces camerini, aujourd’hui occupés par des décorations sans valeur, sont trop petits pour contenir nos peintures. Ils ne les ont jamais contenues. Nos Mantegna seraient bien ici, chez elle, mais ils ne seraient pas chez eux. Il faut donc leur trouver un autre asile…

Reprenons notre course à travers le dédale de la Reggia et cherchons le troisième appartement de la marquise. Au rez-de-chaussée, nous trouvons une cour pleine d’arbustes et ornée d’un petit temple de marbre, qu’on appelle la Cour des Quatre Platanes. Tout le long de ce jardin abandonné, passe une large galerie, et, s’ouvrant sur cette galerie, une suite de petites salles où les Autrichiens avaient installé leur chancellerie (Scalcheria) et divers autres services : enfin, au bout de ces salles, une cour ouverte, un cortile en ruines, les pavés arrachés, remplacés par de l’herbe, les frises ruinées, des creux dans le mur qui doivent avoir été des niches à statues, où l’on voit encore quelques restes de mosaïque, enfin, si l’on regarde bien, tout autour de la frise, usée par le vent, cuite par le soleil, noircie par la pluie, disjointe par les lézardes, ébréchée, on finit par retrouver les lettres qu’il faut pour figurer ces mots au début : ISABELLA ESTENSIS… et à la fin :… FECIT APARTU VIRGINIS MDXXII. C’est bien, ici, comme l’a dit le poète Toscana :


Le lieu que le monde a surnommé la Grotte.
Elle cache en son riche sein
Ce que la belle Italie a de plus précieux ;
C’est la magnanime Isabelle d’Este
Qui l’a construite et splendidement ornée.
Cinq chambres la composent, mais deux d’entre elles
Ont été destinées à abriter les choses de l’Art…


Nous sommes, cette fois, sans doute possible, sur le sol et sous