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Pierre, comte de Périgord, Gabriel, comte de Lesparre, Aune, mariée à Charles de Crov, Isabelle, mariée à Gaston de Foix, comte de Caudale, et une autre fille.

Je ne conterai pas la vie agitée de cet homme, à l’avidité sans scrupule, sous les règnes de Louis XI et de Charles VIII. À l’avènement de Louis XII, avec, lequel il était fort mal depuis la guerre de Bretagne, il fut pris d’une assez vive inquiétude, mais fut tôt rassuré quand il s’aperçut que le nouveau roi avait besoin de lui pour remplir la promesse qu’il avait faite de récompenser Borgia par un riche mariage de tout ce qu’il lui apportait de la part du Pape. Le moment était venu de s’exécuter, et le choix de Louis XII était tombé sur une des filles d’Alain, la belle Charlotte, « une sienne prochaine parente. » Nous ignorons tout sur la première jeunesse de celle-ci, sauf qu’elle était fort belle et de grande vertu. Elle avait dû receveur dans la demeure paternelle l’éducation des filles nobles d’alors. De bonne heure, elle avait été appelée avec ses trois sieurs à la cour de France par Anne de Bretagne qui s’occupait alors de former ses filles d’honneur. « C’estoit, dit le Père Hilarion de Coste, dans son éloge de la Reine[1], une eschole de vertu, une académie d’honneur. Là les premiers seigneurs, non seulement de France et de Bretagne, mais aussi des pays étrangers, tenoient à très grande faveur de mettre leurs filles auprès de cette grande Reine qui, comme une autre Vesta ou une autre Diane, tenoit toutes ses nymphes en une discipline fort étroite et néanmoins pleine de douceur et de courtoisie. » « Charlotte, dit. M. Bonnaffé, avait grandi sous la tutelle intelligente de cette grande Reine au milieu de cette cour honnête, élégante, pieuse, prenant le haut ton de la Cour dans la société la plus choisie, quand Louis XII, à peine monté sur le trône, songea à elle pour César Borgia. »

Des ambassadeurs furent de la part du Roi et de la Reine envovés à Alain d’Albret, chargés de lui proposer pour gendre César Borgia, « considérant les louables et recommandantes biens et vertu qui sont en la personnelle Mlle Charlotte d’Albret, fille naturelle et légitime de haut et puissant prince, Mgr d’Albret, leur proche parente. » Alain d’Albret, dans ses lointains apanages du Midi, et son fils, le faible roi de Navarre, avaient

  1. Histoire catholique des hommes et dames illustres par leur piété, Paris. 1625.