Page:Revue des Deux Mondes - 1912 - tome 10.djvu/423

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

une licence vers laquelle elles penchent déjà par elles-mêmes, qui faisait enfourcher un âne tête à queue par le mari battu et le poursuivait de ses quolibets, était la même qui obligeait les adultères à courir tout nus par la ville. Nous ne signalerons pas toutes les pénalités bouffonnes et cyniques que l’imagination populaire avait inventées contre l’adultère. Elles tendaient d’ailleurs à disparaître et le peuple lui-même arrivait à être choqué du tort que cette façon de venger la morale faisait à la morale elle-même. Ce fut la population d’Avansac qui demanda qu’on laissât tomber en désuétude, comme contraire aux bonnes mœurs, l’article de la coutume qui condamnait les adultères à se montrer tout nus à leurs concitoyens et qui l’obtinrent, en 1623, du parlement de Toulouse malgré l’opposition du seigneur. Les peines infamantes encore en vigueur étaient le carcan, le pilori, la fustigation ; mais les deux premières étaient rares, tandis que la troisième était commune. La fustigation, qui était publique, était suivie du bannissement à temps ou à perpétuité ou de l’internement dans un couvent, spécialement, à partir d’une certaine époque, aux filles repenties. Le bannissement, qui se présente le plus souvent dans nos textes, était destiné à être remplacé par la réclusion et il est probable qu’une étude particulière de la question montrerait dès lors cette seconde pénalité en train de se substituer à la première. Rien ne manifeste mieux que cette substitution l’indulgence qui s’introduisait et se répandait pour la femme coupable. La séquestration, bien que motivée en partie par la crainte du scandale, c’est-à-dire par une préoccupation sociale, semble être une application de la justice domestique et dénote qu’on arrive à considérer l’adultère comme un fait qui n’intéresse plus que la partie lésée, tellement qu’il dépend du mari, qui est tenu de pourvoir à l’entretien de sa femme au couvent, faute de quoi elle sera remise en liberté, de faire cesser cette séquestration en reprenant la coupable. S’il ne le fait pas, l’internement devient perpétuel. Déjà, en principe, il avait seul qualité pour accuser sa femme d’adultère. En réalité il suffisait qu’il y eut scandale pour donner lieu à l’action publique, soit qu’elle se joignît à celle de la partie, soit qu’elle s’exerçât d’une façon indépendante.

Nous n’avons encore parlé que de l’adultère simple. Parmi les circonstances aggravantes qui constituaient l’adultère qualité nous n’en remarquerons qu’une. C’est celle qui consistait