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sommellerie, la chambre des officiers, la chambre de l’écuyer de cuisine, celle de l’aumônier, celle de l’apothicaire, celle des filles d’honneur, celle de « l’homme des filles, » c’est-à-dire de l’homme attaché à leur service, celle des valets de chambre, celle du brodeur.


L’idée que nous avons donnée de la femme mariée, dans son triple rôle d’épouse, de mère et de maîtresse de maison, préjuge celle qu’il faut se faire de la famille où c’est elle seule que nous avons cherchée. La place qu’y tient le mari nous aide encore à comprendre celle qu’elle y tient elle-même. L’établissement de la famille, son ascension à un rang aussi élevé que possible dans la société, voilà la principale affaire du mari, et elle ne lui laisse guère le loisir de s’occuper d’autre chose. Il est à l’armée, il est au palais, il est déjà à la Cour. Il ne peut faire autrement que de laisser à sa compagne le gouvernement domestique. De l’éducation il ne se mêle le plus souvent que quand il s’agit de garçons, et encore au moment où ceux-ci font leur apprentissage et leur début dans la vie pratique et professionnelle, qui commence, il est vrai, de bonne heure. La première éducation virile, sans parler de celle des filles, incombe donc à la mère. L’administration des intérêts domestiques lui appartient aussi, depuis les soins les plus humbles du ménage jusqu’à la gestion du patrimoine. C’est donc à elle qu’il faudrait savoir gré ou demander compte de la prospérité de la famille comme de sa déchéance, si les vicissitudes qui font monter ou descendre celle-ci dans l’échelle sociale n’étaient encore plus, comme nous venons de le dire, l’œuvre du mari qui la représente au dehors, qui la fait profiter ou souffrir de ses mérites ou de ses défaillances. Telle est la conception d’après laquelle s’opère le partage des attributions. Mais il y a autre chose qu’une division du travail dans l’organisation de la famille. Elle a besoin, malgré son dualisme, d’un gouvernement unitaire. Usera exercé par le mari, à moins que ce ne soit par le père du mari encore soumis à la puissance paternelle. Mais la nécessité d’un chef ne s’impose jamais sans faire songer tout de suite aux abus auxquels peut donner lieu son autorité. Scrupule d’autant plus fort ici que la personne qui l’éveille est considérée comme plus faible, plus exposée à être la dupe de son cœur, qu’elle a droit à une protection proportionnée à l’incapacité qu’une tradition,