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Page:Revue des Deux Mondes - 1912 - tome 10.djvu/901

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la chapelle Palatine et la balustrade du triforium ornée de croix symétriques, analogues à celles du fauteuil de la statue de sainte Foy, prouvent qu’il existait un atelier de fondeurs à la cour de Charlemagne.

Les traditions de cet atelier paraissent même s’être perpétuées dans certains monastères saxons, comme le prouvent les curieuses portes de bronze de la cathédrale d’Augsbourg ou la colonne, imitée de la colonne Trajane, de Bernward, évêque d’Hildesheim au XIe siècle. Il en fut de même de l’orfèvrerie en relief. Sur un autel portatif, dont la table est faite d’une plaque de verre antique, Egbert, archevêque de Trêves (977-993), fit représenter en relief le pied de saint André, chaussé d’une sandale dont l’ornementation de gemmes présente les plus grands rapports avec celle des chaussures de sainte Foy. Il est inutile de rappeler aussi le magnifique autel de Bâle conservé au musée de Cluny et exécuté pour l’empereur Henri II (1002-1024). A une autre extrémité de l’Europe, Salomon, roi des Bretons, dans une lettre adressée en 869 au pape Hadrien II, lui annonce l’envoi en offrande d’une statue d’or qui représentait le Pape lui-même monté sur une mule et qui valait « 200 sous d’or[1]. »

Il n’y a rien dans ces faits isolés qui soit comparable au développement de la statuaire religieuse du Midi. Les détails abondans que l’on trouve dans les chroniques sur les trésors des églises, l’ornementation des autels, la translation des reliques, ne laissent aucun doute à cet égard. Ils démontrent que les populations du Nord sont restées fidèles à l’usage d’enfermer les reliques dans des chasses. En 864 par exemple, le chef de saint Riquier est transféré « d’une chasse de bois dans une châsse d’argent ornée d’or et de pierres précieuses, » et des chasses du même genre ornaient les 30 autels des 4 églises de la colonie monastique dont il était le patron[2].

De même dans les détails qu’Helgaud nous donne sur l’ornementation offerte par Robert le Pieux à Saint-Aignan d’Orléans, il n’est question que de châsses ou de tables d’autels ornées de pierres précieuses. Le moine Théophile qui vivait au XIe siècle a écrit une véritable encyclopédie technique dans laquelle passe en revue tous les arts qui peuvent concourir à la décoration

  1. Dom Bouquet, II. F. VII, 596.
  2. Hariulph, Chronique de Saint-Riquier, éd. Lot, p. 120.