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Hygiéniquement, ce service suffit à peu près. Nous disons « à peu près, » car il se présente encore, en été surtout, bien des chances de contamination, et il faudrait que le lavage a l’eau oxygénée diluée fût complété par un rinçage final au moyen de quelques gouttes de lait qu’on sacrifierait ensuite. Mais quel ramasseur se résignerait à une semblable déperdition ? Quant à la température de pasteurisation, 70 degrés, elle est un peu basse et ne fait que restituer au lait chauffé, en le rajeunissant, les propriétés du lait frais. Le massacre des bactéries n’est pas intégral, et il faudrait pour cela arriver à 85 degrés. Mais alors on se heurte à une alternative embarrassante. D’après les hygiénistes, en effet, le lait cuit est moins digestible et aussi moins nourrissant, d’où il résulte qu’en théorie, mieux vaut un lait cru très propre, et, en pratique, du lait cuit, mais chauffé juste à point.

Suralimentation en vue d’accroître le volume du lait, écrémage discret, mélanges rationnels de produits inégaux, addition modérée d’eau claire : toutes ces pratiques accumulées finissent par aboutir à la synthèse d’un lait moyen, tantôt passable, tantôt médiocre, point très salubre, point très malsain non plus, d’une combinaison côtoyant de près la falsification sans en franchir ouvertement la limite. La fraude grossière et brutale par addition d’eau, surtout après écrémage perfectionné a la machine centrifuge, présente, elle, trop de danger pour celui qui la tenterait.

En tout cas, dans la région de Paris, il faut procéder habilement pour constater un mouillage. Qu’on en juge d’après un rapport de M. Noulens, député ; pour une même affaire, il faudra se procurer : un premier échantillon du lait sorti de chez le cultivateur avant qu’il ne soit ramassé, en compagnie de bien d’autres, par la société laitière, un deuxième au dépôt, un troisième a la gare sur les quais d’arrivée, un quatrième sur les voitures du garçon livreur, un cinquième sur les pots vendus cachetés au détaillant, un sixième enfin au cours du débit. Heureusement, par compensation, qu’on dispose d’agens préleveurs très exercés par habitude et que secondent des employés commissionnés par le syndicat des laitiers et crémiers. Grâce aux automobiles dont disposent les membres de ce personnel, il leur est facile de se transporter aisément sur les différens lieux où leur présence est utile, et ils rentrent à Paris bien