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commerce et de bon voisinage : or, en novembre 1836, une lettre de lui parvenait à Paris, annonçant de Tananarive qu’il rentrait en Europe avec une ambassade hova chargée de visiter Londres et Paris. La nouvelle intéressa le ministère de la Marine, et les Affaires étrangères elles-mêmes s’émurent à la venue d’ambassadeurs. Toutes les mesures furent donc prises pour en profiter. Tandis qu’à Londres, au début de 1837, les Malgaches étaient successivement reçus par Palmerston et par le Roi, les Affaires étrangères se faisaient informer de leurs faits et gestes par notre chargé d’affaires ; la Marine, de son côté, obtenait de Garrot quelques renseignemens et les deux départemens, enfin, se concertaient au sujet de la négociation à engager.

On commencerait, bien entendu, par proposer un arrangement commercial ; mais ce ne serait qu’une sorte d’entrée en matière, voire de prétexte. Ici, en effet, reparurent les ambitions persistantes des services coloniaux. Ils tenaient la situation de Sainte-Marie pour beaucoup moins bonne que leurs affirmations officielles ne le donnaient à croire, et, sachant aussi que la colonie de Bourbon s’en désintéressait, commençaient à penser que force serait un jour d’abandonner la petite île ; ils entendaient toujours, d’autre part, venir à leurs fins touchant Diégo-Suarez : ils lièrent donc très habilement les deux questions et firent décider qu’on proposerait aux Hovas de nous reconnaître la possession de Diégo-Suarez qu’ils n’occupaient du reste pas effectivement, en échange de la rétrocession de Sainte-Marie, dont ils nous avaient à diverses reprises contesté la propriété. La France aurait ainsi la baie tant convoitée, et sans recourir à une expédition de conquête dont la seule idée effarouchait beaucoup d’hommes politiques. Malheureusement, les prétendus ambassadeurs n’avaient que des pouvoirs fort limités : ils passaient pour n’avoir rien fait à Londres ; il semble qu’à Paris ils se bornèrent aussi à des conversations sans portée. Heureusement, Garrot était là, toujours serviable et toujours optimiste. On le munit d’instructions précises et, au début de l’été 1837, continuant d’escorter ses Malgaches, il repartait pour Tananarive, afin d’y préparer la conclusion d’un accord officiel. L’affaire paraissait décidément en bonne voie, et, dans son désir de la voir aboutir sans retard, le ministre de la Marine proposait même de procéder à l’occupation sans attendre la signature. Avec une prudence que l’événement justifia, les Affaires Étrangères vou-