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Et d’étranges rêves
Comme des soleils.
Défilent sans trêves,
Défilent pareils
À de grands soleils
Couchans, sur les grèves,

n’est-elle pas l’écho, mais cette fois plus pénétrant et plus parfait, d’accens déjà délicieux ?

Les soleils couchans
Revêtent les champs.
Les canaux, la ville entière
D’hyacinthe et d’or :
Le monde s’endort
Dans une chaude lumière.

(L’invitation au voyage.)

Et le Nocturne Parisien ? La première partie, pour l’allure et l’arrangement, était une réminiscence de Hugo, avec cet effet amusant : « Toi, Seine, tu n’as rien » qui parodie le vers fameux : « Mais Grenade a l’Alhambra » de la pièce des Orientales ; pour le style et pour les images, le jeune virtuose y pastichait aussi le « maître, » ou le « patron, » Leçon te de Lisle lui-même, à le rendre jaloux de cette imitation. Mais la deuxième partie s’inspire surtout des Paysages parisiens :

... Deux quais, et voilà tout.
Deux quais crasseux, semés d’un bout à l’autre bout
D’affreux bouquins moisis et d’une foule insigne
Qui fait dans l’eau des ronds et qui pêche à la ligne.
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Puis tout à coup, ainsi qu’un ténor effaré
Lançant dans l’air bruni son cri désespéré,
Son cri qui se lamente et se prolonge et crie,
Éclate en quelque coin l’orgue de Barbarie.
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C’est écorché, c’est faux, c’est horrible, c’est dur,
Et donnerait la fièvre à Rossini, pour sûr ;
Ces rires sont traînés, ces plaintes sont hachées ;
Sur une clef de sol impossible juchées,
Les notes ont un rhume et les do sont des la ;
Mais qu’importe ! l’on pleure en entendant cela !
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