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fût-ce quelque chose d’exquis, pour les yeux. De ceux-ci, même charmés, constamment charmés, celle-là pourrait bien finir un jour par se lasser d’être dupe.

Le décorateur, et non le musicien, a su dessiner et peindre les sept tableaux tirés du poétique et gracieux roman où Mme Jean Bertheroy conta naguère aux lecteurs de la Revue les amours élégiaques de Nonia la danseuse avec le timide et vierge Hyacinthe, prêtre, ou « Camille » d’Apollon. C’est par un soir d’automne et de vendange, sur le penchant empourpré du Vésuve, que la gentille courtisane acheva de séduire le chaste lévite. Et la suite, plutôt mélancolique et languissante, de l’histoire, n’est que le partage du jeune « camille » entre sa passion et le service, que nous aurions cru moins austère, de son dieu. Après quelques péripéties, dont les principales sont l’indiscrète intervention de Nonia dans les cérémonies du culte et l’excommunication de Hyacinthe, renvoyé, pour manquement à ses vœux, du collège camillien, nous voyons s’aggraver dans l’âme de l’éphèbe le conflit de l’amour divin et de l’autre amour. Le dieu sera le plus fort. Malade et presque mourant, Hyacinthe retourne à son temple, à la cellule qui fut témoin de ses pures ardeurs. En vain Nonia vient l’y rejoindre et s’efforce de l’en arracher. Il est près de la suivre, mais à travers la grille du sanctuaire, l’image sacrée le regarde et le retient. Sur sa couche brûlante, incertain et tourmenté jusqu’à son dernier soupir, il retombe sans vie. Pompéi lui fait de pieuses, de tendres funérailles, et quand la foule s’est retirée et que s’allument les premières étoiles, la petite danseuse vient pleurer, danser une dernière fois, puis se coucher, lasse et mourante elle-même, sur le marbre du tombeau.

Pour la musique, non moins que pour le décor et la mise en scène, enfin le spectacle, il y avait quelque chose là. Mais la musique n’y a rien su découvrir. Peu de jours après la représentation de l’œuvre de M. Nouguès, nous écoutions, au Concert Colonne, les Impressions d’Italie, de M. Gustave Charpentier. Voilà la verve, la joie, la vie populaire, souvent triviale, mais brillante, entraînante toujours ; voilà ce qui manque aux scènes initiales et vendémiaires de la Danseuse de Pompéi. Et le reste de l’ouvrage est pareillement dépourvu de caractère, de couleur et de poésie. Au contraire, qu’elles sont originales, vives et fortes, les impressions que l’académicien d’hier, il y a quelque vingt-cinq ans, reçut de la terre, du ciel et de la mer latine ! Comme elles sont directes et directement rendues ! Comme le sol et la race chantent ici leur vieille chanson ! Ici ? Non pas certes partout. Non pas dans le dernier tableau, Napoli, très amusant, très grouillant, mais qui