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Page:Revue des Deux Mondes - 1912 - tome 7.djvu/127

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La plupart des Australiens sont encore assez sages pour le comprendre ; c’est pourquoi ils se rattachent à la mère patrie plus vivement qu’autrefois et lui offrent des navires, des canons, des faveurs commerciales. Pour l’Afrique du Sud, l’égide de la métropole est aussi une protection, non seulement contre le péril noir qui n’existe guère encore, mais contre la conquête allemande, à laquelle ne se résigneraient aisément ni les colons d’origine anglaise, ni même les Boers, soucieux de toutes leurs libertés. En revanche, l’Angleterre est sans force contre le seul péril extérieur que puisse courir le Canada. Défendu contre toute menace européenne par la doctrine de Monroe plus encore que par la mère patrie, il n’a rien à craindre que des Etats-Unis, et vis-à-vis d’eux l’Angleterre serait complètement impuissante. Il est vrai qu’une intervention violente des Américains au Canada est hors de toute vraisemblance. Une annexion volontaire pourrait être à redouter, si l’on ne ménageait pas assez l’intérêt de l’Ouest grandissant à commercer avec les Etats-Unis ; mais il est un élément où tous les hommes sages, — et c’est ici la grande majorité, — seront toujours opposés à pareille annexion, c’est l’élément franco-canadien, qui serait submergé dans l’Union, tandis qu’il a devant lui un magnifique avenir au Canada.

Ainsi, dans tous les Dominions, le maintien du lien impérial s’impose parce qu’il est la meilleure défense contre les périls extérieurs, en même temps que la garantie des libertés locales. Tant qu’il conservera ce caractère, qui est son plus beau titre de gloire, l’Empire britannique durera, pourvu qu’on sache conserver aux liens qui unissent ses membres, selon le mot très expressif de M. Asquith, leur élasticité et leur flexibilité, qu’on ne prétende point le couler hâtivement dans le moule d’une constitution trop rigide.

C’est ici le second danger qui pourrait menacer l’Empire. L’aristocratie anglaise qui, en fait, sinon en droit, a gouverné la Grande-Bretagne jusque vers la fin du XIXe siècle, était passée maîtresse dans l’art des temporisations et des compromis. Se gardant de la logique absolue, elle laissait le temps et les évolutions naturelles modifier les relations des divers pouvoirs, qu’elle avait soin de ne pas définir de trop avec précision, sans quoi des heurts se fussent produits et la faculté d’évoluer se serait perdue. Mais la démocratie britannique, unioniste aussi bien que radicale, et les démocraties coloniales, comme toutes les