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Masella, on pourrait adopter, comme point de départ des conversations entre la Prusse et Rome, la bulle De Salute, par laquelle le Pape, en 1821, d’accord avec le roi de Prusse, avait organisé l’Eglise prussienne. De part et d’autre, on étudierait ce texte ; le Saint-Siège examinerait quels changemens il y pourrait apporter pour agréer à Berlin ; et la Prusse, en retour, par le fait même qu’elle entrerait dans une telle combinaison, serait amenée à abroger, implicitement, certaines dispositions des lois de Mai, sans qu’il fût nécessaire, pour cela, de procéder à leur révision. Masella, qui avait bien écouté Holnstein et qui l’avait compris, donnait en même temps l’assurance formelle « qu’en aucun cas les personnages politiques engagés dans le conflit ne seraient autorisés à participer aux négociations ; » il protestait enfin du respect du Vatican pour les légitimes prérogatives de la suprême autorité civile. Ainsi faisait-il le geste d’arborer en face de Bismarck, sans appeler à la rescousse les membres du Centre, une bulle qui existait toujours, que la souveraineté prussienne avait jadis acceptée, et que la souveraineté papale était disposée à modifier, pour rendre la paix à l’Allemagne. La note, soigneusement étudiée, fut remise au comte Holnstein le 4 mai.

Mais à ce moment même, les rares prêtres prussiens qui, après les lois de 1875, avaient consenti à accepter encore un traitement du gouvernement, recevaient de Rome un avis fort troublant : la Congrégation du Concile, qui avait examiné leur cas, leur signifiait que, par une telle attitude, ils donnaient aux fidèles un sujet public de chagrin, et les invitait à déclarer publiquement, dans un délai de quarante jours, qu’ils ne se soumettaient pas aux lois de Mai et qu’ils ne comptaient plus émarger au budget. S’ils s’y refusaient, ils seraient ipso facto suspendus. A l’écart des diplomates, à l’écart de la secrétairerie d’Etat, le cardinal Caterini, préfet du Concile, avait lancé cette sommation. Il ne s’inquiétait pas de ce qui se mûrissait dans les chancelleries ; il voyait des prêtres rebelles ; il levait son bras pour les frapper. Il pouvait dire que, gardien de la discipline religieuse, cette discipline, seule, l’intéressait, et qu’il ne s’occupait point de politique. Mais nos actes font ricochet, et ces ricochets se prolongent, avec une logique qui nous déroute ; et par l’effet de ce fatal mécanisme, le zélé cardinal faisait de la politique sans le savoir, comme, sans le savoir, M. Jourdain faisait de la