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CHRONIQUE DE LA QUINZAINE.




Le traité franco-allemand a été voté au Sénat par 212 voix contre 42, ce qui est une belle majorité. Ce vote fait honneur à la sagesse de la haute assemblée, mais il a été lent à obtenir : toute une semaine de discussion y a été nécessaire. L’éloquence a coulé à pleins bords ; les orateurs se sont surpassés ; l’importance et la grandeur du sujet ont aiguillonné leur talent ; néanmoins, ce sujet lui-même n’a été profondément renouvelé ni par les longues investigations auxquelles la Commission s’est livrée, ni par les longs discours qui ont été prononcés, et le pays n’en sait pas beaucoup plus après ce débat qu’il n’en savait avant. Dès le premier jour, en dépit des attaques dont le traité devait être l’objet, personne ne doutait qu’il serait voté : dès lors, à quoi bon multiplier les critiques, les répéter, les aggraver, sans songer qu’elles devaient avoir pour conséquence d’affaiblir entre les mains du gouvernement l’efficacité et la portée de l’instrument politique qui doit l’aider à débrouiller une situation complexe, confuse, périlleuse peut-être ?

Que la situation soit complexe, tout le monde en convient. Qu’elle reste confuse, même après la discussion du Sénat et aux yeux du Sénat lui-même, la preuve en est dans le singulier éclectisme avec lequel il a applaudi les discours les plus divers et même les plus opposés. Il s’est plu à écouter, souvent avec faveur, les orateurs de la droite, MM. Jénouvrier, de Las Cases, de Lamarzelle, qui ont parlé du traité sans indulgence ; puis il a applaudi M. d’Estournelles de Constant qui, seul, a eu le courage de le défendre et de le déclarer bon ; puis il a approuvé les observations toutes pratiques présentées par M. Baudin, qui a très fidèlement rempli son rôle de rapporteur ; puis il a acclamé M. Pichon, qui a attaqué le traité avec véhémence et a déclaré qu’il ne le voterait pas ; puis