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un équilibre d’avantages et de charges ; mais tous les élémens en ont changé de valeur avec le temps ; dangers de la vie sur mer et ses profits, qui caractérisent l’intérêt du monopole ; organisation professionnelle du pays et durée de l’assujettissement militaire ; conditions propres du métier de marin et de la vie ambiante. Ni en valeur absolue, ni en valeur relative, aucun des élémens du marché tacitement conclu par l’Inscription maritime n’a plus son sens d’origine : il est temps de le réviser.

On n’y voit d’ailleurs plus clair dans l’enchevêtrement administratif qui résulte d’une situation si profondément modifiée. Le recrutement de la marine, à lui seul, est régi par quatre lois juxtaposées : celle de 1896 pour ce qui est des inscrits ; celle de 1886 pour les engagemens volontaires dans les écoles de mousses et d’apprentis ; celle de 1889, maintenue en vigueur pour l’armée de mer seulement, pour les autres engagemens volontaires ; enfin du 21 mars 1905, pour l’incorporation des hommes du contingent choisis parmi ceux qui en ont fait la demande. Cette dernière reconnaît d’ailleurs à la marine, comme il avait été fait à d’autres époques, la faculté d’obtenir la mise à sa disposition d’office d’un certain nombre de jeunes soldats appelés, qu’elle n’emploierait qu’à terre. Mais elle remet à une loi spéciale l’institution définitive et le fonctionnement de cette possibilité, loi spéciale non encore soumise aux délibérations du Parlement. Cette source reste donc fermée. On. peut même dire que le recrutement normal des troupes de mer par l’Inscription maritime joue illégalement. Il continue à être régi par les dispositions caduques de la loi de 1889 sur le service de trois ans qui l’avait visé, alors que la loi de 1905 sur le service de deux ans lui est matériellement inapplicable. Demain une classe entière peut réclamer du Conseil d’Etat sa libération immédiate, un tiers de l’effectif marin des équipages peut être enlevé à la flotte.

La marine n’a pas négligé de préparer cette loi nouvelle si évidemment nécessaire. Une commission, présidée par M. le commissaire général Rouchon-Mazerat, a rédigé un projet, enfin déposé le 11 mai 1909 sur le bureau des Chambres, après de longs délais dus à l’hostilité du ministère des Finances et de la Commission du budget.

Ce projet de loi, tout en maintenant le côté économique dé l’Inscription maritime, en change complètement la base militaires.