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à dos, et, dans l’obscurité de la nuit, le passage de la rivière, rendu difficile par l’artillerie et les autres voitures, pouvait se transformer en une déroute. » Alvensleben destina à cette attaque six bataillons sous l’ordre du général Schwerin. Deux autres restant en réserve au pied de l’Eperon, trois devaient former la première ligne et trois la soutenir. Il ne crut pas nécessaire de couvrir sa droite vers Stiring, ne sachant pas que, depuis sa retraite, Woyna était en mauvais état.

Schwerin, désobéissant formellement sous prétexte d’initiative, se porte, avec trois bataillons de la deuxième ligne, du côté de Stiring où il entend le canon et il ne destine à l’attaque de la hauteur boisée, sous les ordres du colonel de l’Estocq, que trois bataillons de la première ligne accrus de quelques détachemens de la division de Kameke établis à la Brème d’Or et à la maison de Douanes. Il compromet ainsi le succès de la manœuvre à laquelle son chef attachait une importance décisive. Le sort de la journée en dépendait tellement que les Prussiens, officiers et soldats, l’entreprenaient « dans une angoisse terrifiée. »

Les bataillons rompirent entonnant à pleine gorge la Wacht am Rhein. Ils comptaient trouver la route facile et la position accessible. Ils furent déçus. Le général Bataille, s’étant aperçu du péril des troupes en lutte sur la hauteur, leur avait envoyé de la vallée deux bataillons du 8e sous le commandement du lieutenant-colonel Gabrielli. D’un coup d’œil rapide, le colonel voit le danger et comprend qu’il faut à tout prix protéger les troupes engagées au Nord du plateau contre le mouvement enveloppant qui les mettrait entre deux feux. Il place un de ses bataillons dans le petit bois qui domine le Forbacherberg, la gauche appuyée à la route qui conduit sur le plateau de Spicheren ; il étend l’autre bataillon déployé sur le plateau depuis le Forbacherberg, jusqu’en face de la Brème d’Or. Les Prussiens se glissent, ardens, nombreux, le long du ravin boisé qui échancre cette partie du plateau. Nos intrépides combattans du 8e, animés par leurs officiers, infligent à leurs adversaires des pertes cruelles. Malheureusement, les nôtres n’étaient pas moins sensibles : à sept heures du soir, 280 officiers et soldats étaient tués ou blessés et Gabrielli tombait, la jambe droite emportée par un boulet.

Les Prussiens sont tenus en échec. Les deux bataillons du 8e,