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Page:Revue des Deux Mondes - 1912 - tome 9.djvu/366

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craignit point l’influence du Pape, puisque celui-ci tenait tout de lui, mais les suites en furent funestes et irréparables.

PORTALIS. — « Vous ne voulez pas établir un divorce entre le ciel et la terre. Tout ce qui tend à rendre sacré celui qui gouverne est un grand bien. Le malheur de nos jours est qu’on raisonne trop la puissance. Quand les peuples la croyaient conférée par la divinité, ils la regardaient comme sacrée.

TREILHARD. — « Ce ne fut jamais sans de grands inconvéniens qu’on joignit la religion à la politique.

« Cette démarche sera-t-elle conséquente dans le moment où la nation proclame la liberté des cultes ? De quel œil croyez-vous qu’elle sera considérée des Cabinets protestans? Et si jamais un des successeurs de l’Empereur est protestant, il changera donc le cérémonial. » Ne serait-il pas bien plus sage d’établir un mode constant et indépendant de tout culte ?

REGNAUD. — « Il est important de constater que ce sont les peuples et non Dieu qui donnent les couronnes. La divinité les laisse donner. Il faut que la cérémonie soit indépendante de toute opinion religieuse, puisque vous y faites assister les chefs des Eglises protestantes. Si vous voulez y faire participer la religion, séparez donc les deux cérémonies. Que l’Empereur aille d’abord invoquer l’Eternel, il se rendra de là à la cérémonie qui sera purement civile et politique, puis on pourra la terminer par un Te Deum. »

MONTALIVET observe qu’outre la qualité de chef de l’Eglise, le Pape réunit encore celle de souverain temporel ; il ne voit point la nécessité de la présence du Pape pour faire intervenir la religion.

L’EMPEREUR. — « Ce n’est point Charlemagne, c’est Pépin qui fut couronné à Paris par le pape Etienne.

« Ce n’est plus le siècle où l’on peut craindre l’influence du clergé. Nous ne sommes plus au temps où un concile coupait les cheveux a l’Empereur. Toute idée exclusive de religion est passée. On ne change plus de religion. Chacun vit dans celle où il est né.

« Ce qu’on doit conséquemment considérer ici, c’est si cette démarche sera utile à la masse de la nation, si ce n’est pas un moyen de nous attacher les nouveaux pays et ceux qui ont été aliénés : le Piémont, la Belgique, la Vendée. Il existe des discussions religieuses, il y a encore des prêtres qui correspondent avec