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Page:Revue des Deux Mondes - 1912 - tome 9.djvu/460

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M. Bouchard aligne en bronze et qu’il intitule le Défrichement. Ils font chanter, dans la mémoire, les vers fameux de Pierre Dupont :


Les voyez-vous, les belles bêtes,
Creuser profond et tracer droit...


Mais que défricheront ces colosses sur les pelouses parisiennes où, sûrement, ils vont être placés? Et qui souhaite de voir au milieu de Paris ce fac-similé d’un spectacle si commun par toute la France? Voilà ce que dit, au premier abord, le passant bénévole. Et puis, il réfléchit. Il songe à toutes les actions esthétiques, à tous les gestes utiles, à tous les beaux engins disparus de la vie et que nous sommes reconnaissans à l’art de nous avoir conservés. Qui peut dire que la charrue, la charrue traînée par des bœufs, dirigée et maintenue par la main, ne disparaîtra pas, elle aussi? Ce jour-là, on sera peut-être heureux, au milieu de la Cité décuplée et devenue un « désert d’hommes, » de trouver un monument qui serve à comprendre les vers de Pierre Dupont ou bien les vieux textes sur le « Labourage par la traction animale, » — comme nous consultons aujourd’hui, pour connaître la vie des anciens, les engins et les gestes les plus communs figurés dans les bas-reliefs de Ninive, ou sur le tombeau de Ti.


ROBERT DE LA SIZERANNE.