Page:Revue des Deux Mondes - 1913 - tome 13.djvu/180

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

membres du Centre, à tout propos, dans la mêlée électorale, le nom du Pape et la parole du Pape. Leur programme invoquait une manifestation nouvelle du peuple contre la loi qui frappait les Jésuites, et contre la loi qui permettait d’exiler les prêtres, loi toujours maintenue par le Conseil fédéral ; mais la presse bismarckienne disait au peuple catholique : Ecouterez-vous les hommes qui ont désobéi au Pape ? Oui, ils avaient désobéi : Bismarck voulait qu’on le sût. « Windthorst et Franckenstein haïssent le Pape, déclarait Bismarck, le 22 janvier, au prince de Hohenlohe : Windthorst, parce que le Pape a traité avec moi sans le consulter ; Franckenstein, parce que le Pape, en adressant à Lutz un bon témoignage, a gâté ses chances de devenir ministre. » Qu’ils fussent mauvais Allemands, on le savait depuis longtemps : ils étaient, par surcroit, Bismarck s’en faisait juge, de mauvais catholiques. Parlant au Landtag, le 24 janvier, de l’alliance entre leurs votes et ceux des socialistes, il les prévenait que les électeurs seraient bientôt édifiés sur ce que pensait d’eux la Curie romaine ; puis, en février, graduant les coups, il faisait savamment divulguer, par un journal de Vienne, la seconde lettre de Jacobini, et quelques jours après, par un journal de Munich, la première lettre. Brandir, à la veille des élections, des documens du Vatican, c’était pour lui une vieille habitude ; seulement, jadis, il étalait des lettres de Pie IX hostiles à l’Allemagne, et faisait dire au peuple : « Voilà ce qu’est le Pape. Voterez-vous pour les gens du Centre, qui sont ses hommes ? » Il disait aujourd’hui : « Voterez-vous pour les gens du Centre, qui sont contre le Pape ? »

Lui, Bismarck, il était pour le Pape, avec le Pape : les électeurs l’entendaient, en Prusse, le 15 janvier, annoncer au Landtag prussien, dans le discours du trône, un prochain projet de loi qui réglerait, à la satisfaction des deux parties, les rapports de la Prusse et de l’Eglise ; et puis, le 24 janvier, déclarer que, si tous les ministres avaient été de son avis, il serait encore allé plus de l’avant dans les voies de la révision. Les électeurs voyaient le ministère prussien, le 27 janvier, permettre aux ordres religieux admis en Prusse de recevoir des novices sans autorisation spéciale ; le 13 février, supprimer la formule de serment que Falk en 1873 avait prétendu imposer aux évêques ; et Léon XIII, apparemment, était content de Bismarck, puisque Dinder, le nouvel archevêque de Posen, était invité par