Page:Revue des Deux Mondes - 1913 - tome 13.djvu/203

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

se jeta à son tour sur l’adversaire et le Roi profita du combat, qui fut long et acharne, pour prendre le large avec sa flottille.

Trop tôt fatigué de cette guerre où le succès semblait lui revenir, préoccupé d’ailleurs de la situation intérieure de son royaume, Gustave III, à qui l’on reprocha fort son inconstance et sa légèreté, signa le 14 août suivant le traité de Vœrélœ. Rien n’était changé en Finlande et l’heureuse Russie avait échappé à un danger sérieux.

Retenons ici, en tout cas, la fière audace de l’entreprise, digne des beaux temps de la Suède, sous le grand Gustave et sous Charles XII.

Moins aventurée sans doute, mais chanceuse encore était l’expédition que les Anglais préparaient, au commencement de 1801, pour nous enlever l’Egypte. Pas beaucoup plus que la flotte suédoise en 1790, la flotte anglaise n’était maîtresse de la mer, du moins de la Méditerranée orientale. Or, le corps expéditionnaire se rassemblait à Makri, en Asie Mineure, en même temps que les 60 ou 70 voiles qui devaient le jeter sur la place d’Aboukir, sous la protection des 7 vaisseaux de ligne et des 4 frégates de lord Keith. Pendant ce temps le gouvernement consulaire, parfaitement au courant des desseins de l’Angleterre, s’occupait activement de faire passer des renforts à l’armée d’Egypte, sensiblement réduite depuis les trois années qu’elle occupait le pays. Je passe sur diverses mesures de détail[1] et sur des mouvemens d’escadre, françaises ou espagnoles, qui avaient pour objet de distraire l’attention des forces navales anglaises de l’Océan et du détroit de Gibraltar. Le point essentiel est que le vice-amiral Ganteaume, sorti de Brest, le 23 janvier 1801, par coup de vent de Nord-Ouest, avait réussi à pénétrer dans la Méditerranée avec 7 vaisseaux et 2 frégates, force égale à celle que l’Amirauté avait donnée à lord Keith. Malheureusement l’officier général français n’avait ni la sûreté de vues, ni la fermeté de caractère nécessaires dans les circonstances où il se trouvait. A peine eut-il passé le détroit qu’il se crut entouré par les escadres anglaises, alors qu’il n’y avait dans le bassin occidental de la Méditerranée que les quatre

  1. 4 frégates furent envoyées isolément pour porter des troupes à Alexandrie. 3 arrivèrent à bon port ; la 4e, l’Africaine, fut capturée par la frégate anglaise Phœbé après un sanglant combat.