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Page:Revue des Deux Mondes - 1913 - tome 13.djvu/486

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on est effrayé quand on les énumère. Quels que soient les conseils qui lui aient été donnés, l’Autriche n’a pas désarmé, et la Russie se voit obligée de prendre à son tour ou de maintenir en les développant des mesures militaires dont le poids matériel pèsera sur elle et le poids moral sur tous. Le litige pendant entre l’Autriche et la Serbie n’est pas réglé, et il est d’autant plus inquiétant que les termes en sont encore mal connus. Dans une intention qu’on ne saurait trop louer, la Serbie a annoncé officiellement que, dès le lendemain de la paix, elle évacuerait les rives de l’Adriatique. L’Autriche justifiait le maintien de ses armemens par l’incertitude qu’elle conservait à ce sujet. L’incertitude est dissipée : que fait l’Autriche ? Rien, elle maintient ses armemens. L’Albanie n’est pas délimitée et on prévoit qu’elle ne le sera pas sans de très grandes difficultés, dont la première est celle de Scutari : les Monténégrins revendiquent la ville, bien qu’ils ne l’aient point prise et la plupart des puissances la leur accordent, mais l’Autriche la leur refuse. La Roumanie n’est pas encore parvenue à s’entendre avec la Bulgarie sur la rectification de frontières qu’elle réclame et, devant le caractère dilatoire et fuyant des négociations qu’elle a engagées à ce sujet, elle s’apprête à mobiliser en vue de profiter des occasions nouvelles qui pourraient se présenter et de réparer ses omissions passées. Après les armemens de l’Autriche et de la Russie, ceux de la Roumanie nous apportent un nouveau et très grave sujet d’inquiétude. Si la Roumanie passe de la menace à l’acte, que fera la Russie, patronne des Bulgares ? Et si la Russie appuie la cause des Bulgares, que fera l’Autriche, qui semble bien avoir des engagemens avec les Roumains ? Le danger se déplace, il ne diminue pas. On annonce que l’Allemagne, à son tour, prend des mesures militaires insolites. Les unes après les autres, grandes ou petites, les puissances s’engagent sur une pente glissante. Très sincèrement, nous en sommes convaincu, aucune ne veut la guerre, toutes même la redoutent, mais à tout hasard elles s’y préparent et, par la manière dont elles s’y préparent, elles s’y exposent. C’est ainsi que se présente l’Europe au seuil de l’année 1913.


Francis Charmes.


Le Directeur-Gérant,RMES
Francis Charmes.HRMES