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des puissances subordonnées, représentans révocables de la seule puissance souveraine, l’Etat. Qu’un ministre tel que Falk reprit le pouvoir, et la loi sur l’inspection scolaire, au nom de laquelle l’Eglise, pour l’instant, avait recommencé d’influer dans l’école, servirait à la détrôner. Enfin la loi de 1875, qui supprimait de la constitution prussienne les trois articles garantissant la liberté des Eglises, abandonnait à la merci de toutes les Chambres successives les destinées du catholicisme prussien ; et comme Bismarck n’avait jamais cessé de redire, l’histoire en main, qu’entre l’Empire et le sacerdoce la paix n’était et ne pouvait être qu’une trêve, le Centre aurait voulu que des garanties constitutionnelles, abritant l’Eglise contre certains caprices parlementaires, assurassent à la trêve nouvelle une certaine longévité.

Telles étaient les trois lacunes sur lesquelles se portaient, surtout, les regards de Windthorst et de ses collègues ; les trois lacunes qui les rendaient mécontens.

Mais en dépit de ces points noirs, la paix qu’avaient cimentée Léon XIII et Bismarck était, effectivement et réellement, une paix. Le prince d’Isenburg, dans une brochure, hasardait à cet égard, contre les objections du Centre, certaines réflexions qui, dans le recul des temps, apparaissent exactes. La guerre religieuse avait dévasté la Prusse, parce que l’obéissance à certaines lois, parce que l’application de certaines lois, était incompatible avec la conscience des hommes d’Eglise ou avec la conscience des fidèles ; parce que ces lois, fatalement, inévitablement, devaient se heurter à la résistance passive des prêtres corrects, à la résistance passive des catholiques corrects. Au lendemain de la loi de 1887, il ne subsistait plus en Prusse un seul article législatif qui contraignît les catholiques ou les prêtres à désobéir, et qui, lésant leur conscience, leur imposât l’attitude de citoyens indociles, et les exposât aux sanctions pénales de cette attitude toujours troublante. L’Eglise de Prusse avait encore beaucoup à désirer ; les susceptibilités catholiques avaient toujours beau jeu pour dénoncer, çà et là, des incidens fâcheux, et pour en conclure, un peu hâtivement, qu’un nouveau Culturkampf était proche. Mais les prêtres de Prusse, les catholiques de Prusse, avaient cessé d’être divisés contre eux-mêmes ; il n’y avait plus, en leur for intime, possibilité d’aucun duel entre la soumission réclamée par la loi et la soumission due au Pape. Oui, dans un