Loin de moi la pensée de donner à ce mot vouloir le sens d’une volonté humaine ; de même qu’en parlant de l’effort vers la vie, je me gardais de prêter à ce mot le sens d’un effort humain. Mais, tout en se défiant des mots qu’on emploie, imparfaits, parce qu’ils sont humains, et inadéquats aux grandes forces incomprises, du vaste univers, il demeure certain que l’intelligence de l’homme est la conséquence des lois biologiques naturelles ; et cette proposition a un tel caractère d’évidence que personne ne pourra le contester.
Donc, s’il est des lois qui transforment la matière inanimée en matière animée, qui compliquent la matière animée au point de la façonner en des mécanismes parfaits, qui donnent à la matière animée inconsciente la pensée et l’intelligence, ces lois-là vont ressembler à quelque vague finalité.
Peut-être serait-il plus prudent de ne pas aller jusqu’à cette conclusion, et se contenter d’établir les faits. Mais, malgré nous, cette conséquence rationnelle s’impose à notre esprit ; et on a d’autant plus le droit de l’accepter qu’elle est aussi utile pour l’enseignement que pour l’étude de la biologie.
En effet, toutes les fois qu’un professeur enseigne la physiologie ou la biologie, il est forcé de faire appel à la finalité. Comment fera-t-il comprendre aux jeunes étudians les actions réflexes, les sécrétions, la fécondation, les propriétés chimiques des humeurs, s’il n’ajoute pas, à la sèche et impartiale nomenclature des phénomènes, des explications qui les éclairent et les justifient. Rien n’est plus attachant qu’une physiologie qui se déroule ainsi ; car chaque mécanisme est expliqué ; chaque particularité anatomique trouve sa raison d’être. Même, lorsque toute conjecture est impossible, c’est un attrait de plus ; car on y voit aussitôt une exception, une anomalie. Alors un problème nouveau est posé qui excite la curiosité des chercheurs.
Enseignée et conçue ainsi, non seulement la physiologie est plus attrayante, mais elle est plus facile. Elle devient une science véritable, cohérente, au lieu d’être une énumération de phénomènes que nul lien ne rattache. Sans le secours de la physiologie générale, la physiologie serait une science maussade, hérissée de détails techniques minutieux. Mais la physiologie