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HEURES D’ITALIE

AU PAYS DES PEINTRES VÉNITIENS


I. — UDINE

« Udine est une belle ville, » déclare Chateaubriand, qui y remarqua surtout le Municipe et son portique imité du Palais des Doges. L’auteur des Mémoires d’Outre-tombe a raison ; et je m’étonne qu’elle soit si peu connue, cette délicieuse cité, perle du Frioul, qui offre généreusement tant de merveilles à ses hôtes : un aspect infiniment séduisant, une des plus jolies places d’Italie, une situation incomparable au centre de la plaine vénitienne, de bons peintres locaux et l’une des plus complètes collections de Tiepolo qui soient. Les touristes allemands et autrichiens, qui descendent à Venise par la ligne de Pontebba, s’arrêtent parfois à Udine, entre deux trains ou pour y passer la nuit ; mais qu’ils sont rares les Français qui prirent la peine d’aller jusqu’à elle ! Chateaubriand ne la vit que parce qu’il dut se rendre à Prague pour y rejoindre Charles X. D’ordinaire, nos compatriotes, retenus par les charmes de Venise, ne la quittent qu’au dernier moment, quand sonne l’heure du retour. Moi-même, si curieux pourtant des moindres coins d’Italie, qui, tant et tant de fois, ai parcouru cet adorable Veneto qu’empourpre l’automne, jamais encore je ne m’étais résolu à dépasser Conegliano et à prendre les quelques journées nécessaires pour visiter le Frioul et sa capitale.

Cette année, je me suis décidé. Débarqué à Udine un soir de