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REVUE LITTÉRAIRE

UN GROUPE[1]

Dans l’extraordinaire désordre et dans l’abondance éparpillée de la littérature contemporaine, voici pourtant un groupe, et qui mérite d’être signalé.

D’ailleurs, il n’est pas le seul. On en trouverait d’autres ; et même on en trouverait plus, sans doute, que ne le voudraient les écrivains qu’on y rangerait, car il est peu de jeunes écrivains — et de vieux, si je ne me trompe, — de qui l’on ne pût dire ce que disait, d’un peintre vaniteux, un peintre dénué de clémence :

— Il ne fait rien : il cherche sa personnalité !

L’anarchie est plus apparente que réelle. Réelle, ce serait trop beau : nous aurions autant d’écrivains originaux que d’écrivains. Admirons principalement une grande individualité littéraire, qui a fait acte de désinvolture et qui s’épanouit toute seule ; mais dédaignons la singularité fausse. Que de talens sont dévoués à eux-mêmes et ne valent pas tout ce dévouement ! S’ils se dévouaient à une idée, l’idée en vaudrait peut-être la peine. L’abnégation volontaire suppose la connaissance de soi ; et elle est un principe de force. Autour d’une idée, pour veiller sur elle, pour la soigner et pour favoriser son meilleur éploiement, on n’est pas trop de plusieurs. Ainsi, les groupes littéraires sont honorables et intelligens qui, au désordre stérile et rabâcheur, substituent l’effort concerté.

Le groupe que j’annonçais, quatre volumes tout récens le caractérisent :

  1. François Mauriac, L’Enfant chargé de chaînes (Grasset, éditeur) ; — Robert Vallery-Radot, L’Homme de désir (Plon) ; — Ernest Psichari, L’Appel des armes (Oudin) ; — Jean Voriot, Les Hasards de la guerre (Crès).