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qu’une interversion dans la succession des corps d’armée que cet ordre concernait.

Au résumé, il restait ferme que l’ordre général mettait deux corps en marche sur la route de Metz à Verdun par Mars-la-Tour, et les deux autres sur la route de Metz à Verdun par Doncourt, qu’il fallait gagner par un chemin de traverse encaissé, un col, celui de Lessy, et un ravin, celui de Chatel. — Que l’état-major eût reconnu d’autres voies, qu’importe ? Il ne les a pas indiquées au commandement, M. de Ladmirault mit sa division de tête sur la voie qui lui était tracée, à l’heure dite, sans attendre la réponse à la demande de sursis qu’il m’avait confiée ; cette troupe ne put déboucher, comme je l’avais dit. Ce que voyant, il prit avec le reste du corps la route excentrique, mais libre, de Metz à Montmédy, par Woippy. Est-ce là qu’il désobéit ? Le maréchal ne l’estima pas, car il dit : «... Le général de Ladmirault l’a prise, il a bien fait. » (V. Procès, p. 163.)


III

Passant à la troisième de ces journées, celle du 16 août, dite journée de Rezonville, la critique pose le dilemme suivant : « La faute capitale de la journée, l’inertie de notre droite, ne peut être imputée à la fois à Ladmirault et à Bazaine. Bazaine n’a-t-il pas ordonné, Ladmirault ne mérite aucun blâme ; Ladmirault a-t-il désobéi à un ordre donné, Bazaine échappe à tout reproche. »

De même que tout à l’heure j’avais peine à reconnaître ma déposition sur la journée du 15 dans la manière dont elle était reproduite, j’en ai davantage encore à raccorder mes souvenirs de celle du 16 avec cette double indication d’inertie d’une part et de manque à l’obéissance de l’autre : d’une part, je ne me rappelle pas y avoir entendu parler d’un ordre quelconque du maréchal ; d’autre part, je crois y avoir eu pas mal à travailler de mon état. Cela si bien qu’au soir nous en fûmes pour trois généraux et deux mille hommes de perte, — de ceux que M. Ollivier dit être demeurés « les bras croisés[1]. »

Il y avait un ordre de marche, celui que j’avais rapporté la veille : il consistait uniquement à s’établir, s’éclairer et se garder

  1. Voyez la Revue du 1er juillet, p. 24.