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Page:Revue des Deux Mondes - 1913 - tome 17.djvu/309

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DE L’HISTOIRE
ET
DES HISTORIENS

I
DE L’HISTOIRE


I. — DÉFINITION DE L’HISTOIRE

Voltaire dit très simplement et très justement : « Les premiers fondemens de toute histoire sont les récits des pères aux enfans, transmis d’une génération à une autre. » L’histoire, en effet, est le sentiment de la continuité dans le corps social, de même que la vie est le sentiment de la continuité dans l’organisme individuel. L’homme n’existe que parce qu’il a conscience de son existence, et cette conscience est en lui, parce que, se souvenant constamment d’avoir été avant, il en conclut qu’il restera lui-même après : « Je me souviens, donc je suis. » De même, l’Humanité[1].

La mémoire est la faculté initiatrice de l’Intelligence ; or, l’Histoire étant la mémoire des sociétés, on peut dire qu’elle est la faculté initiatrice de la civilisation.

Sans elle, la société n’existerait pas, puisqu’elle n’aurait

  1. Michel Bréal donne la même origine étymologique au mot mens « l’Intelligence » et au mot memini, « je me souviens » : « Le mot qui présente la racine sous la forme la plus simple est memini… Cette racine men est du petit nombre de celles qui expriment une opération de l’esprit ; elle marque principalement les actes de la mémoire et ceux de l’imagination. De la racine men vient, sans doute, le nom de Minerva, » la Déesse de l’Intelligence. »