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profonde reflète notre barque si mince et toutes les étoiles.

« Je m’arrête, monsieur l’inspecteur. Je ne vous propose pas que nous entrions dans l’église du village. Vous m’avez dit, dans votre lettre publique, qu’il vous était pénible d’y voir affichée, sous le porche, la liste des manuels condamnés. Evitons, aujourd’hui, ce qui pourrait vous contrarier. Ne passons pas le seuil. Aussi bien, même du dehors, l’église est parlante. Elle a ses parures, elle a ses discours pour le passant et pour les gens de la place publique, — paroles citoyennes autant que religieuses, sans lesquelles l’histoire du village français devient incompréhensible. Nous y avons tous collaboré, à cette haute maison collective, et, frères ennemis, nous y pouvons venir respirer une atmosphère de paix supérieure. Je vous remercie de l’avoir dit. Après vous avoir entendu, comment nier la valeur éducative de notre architecture religieuse ? L’église n’est pas un bibelot. Elle est une âme qui contribue à faire des âmes.

« De toutes parts, on me fait des concessions, on m’accorde que j’ai à moitié raison ; on veut bien laisser debout les belles églises. Arrière ce raisonnement ! C’est le point de vue de l’amateur, de l’heureux automobiliste qui dit : « On ne peut pas s’arrêter partout ! Si, dans ma journée, en roulant les routes, je rencontre une dizaine de jolis spécimens bien choisis et bien entretenus, c’est plus qu’il ne m’en faut. » Une telle conception contredit absolument votre pensée et la mienne. Nous voulons maintenir l’église du village en nous plaçant au point de vue de l’habitant. Pour lui, pour nous, il n’en est pas de laides. Fût-elle dédaignée, la moindre église rurale enrichit la vie locale et constitue, pour ceux-là mêmes qui la regardent du dehors, une valeur spirituelle. »


... Mais je m’arrête. Il ne faut pas qu’après avoir cédé au plaisir d’indiquer un peu longuement les précieuses sympathies qui me portent, je me laisse en outre aller aux effusions de ma reconnaissance. Il suffit ! on connaît maintenant mes raisons d’espérer. Toutes ces voix posent la question avec une force et une netteté souveraines. Mes collègues de la Chambre ne peuvent pas déchirer, annuler cette formidable pétition des artistes et de tous.

Un Augagneur, — je le prends comme un des chefs de l’anti-catholicisme, — a beau approuver La Lanterne qui déclare « impossible de justifier l’intervention des pouvoirs publics en