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Le carrosse était parfois suivi d’un coche, moins logeable, représentant à la fois la 3e classe et le fourgon à bagages ; dans la palache et la gondole, types inférieurs, les voyageurs étaient tellement pressés que chacun redemandait son bras ou sa jambe à son voisin quand il s’agissait de descendre. Plus légère était la galiote, emportée au trot des enragés ; le voyageur non nourri, dans ces véhicules, payait le même prix qu’un voyageur à cheval, nourriture comprise : de Rennes à Brest par exemple, en 1716, le tarif est de 87 francs pour ces deux catégories.

Au dernier rang venait le cabas ou carabas, majestueuse cage d’osier, attelée de 8 chevaux qui faisaient quatre petites lieues en six heures et demie pour mener l’humble solliciteur à Versailles : 26 personnes s’y entassaient, tandis que les « pots de chambre » n’en contenaient que six à l’intérieur, plus deux singes sur l’impériale, deux lapins à côté du cocher et deux araignées derrière, comme ils pouvaient. Dans ces « coches non suspendus, » le prix d’une place, aller et retour, de Paris à Versailles, était de 4 francs au lieu de 10 francs dans le « carrosse » et de 100 francs, plus 2 fr. 50 de pourboire, que coûtait à un grand seigneur le loyer d’une berline à six chevaux pour le même déplacement.

A l’intérieur de Paris, les prix étaient, sous Louis XV, égaux ou supérieurs à ceux de nos jours ; depuis 30 francs par jour pour le carrosse de remise, jusqu’à 3 fr. 50 l’heure pour le fiacre à glaces de bois, domicile roulant, utile à la galanterie, disaient les chansons du temps, car


Du voyage de Cythère
Il précipite le cours.


Ces voitures de place, d’ailleurs fort mal tenues, avaient des cochers turbulens, espèce « dégoûtante par la manière dont ils sont vêtus, » qui, d’après une ordonnance policière de 1735, « tiennent des propos infâmes quand on leur fait des observations. »


II

Créées séparément et toujours en vertu d’un privilège spécial, les diverses entreprises de transport étaient en guerre incessante les unes avec les autres. Les conflits se multiplièrent au