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LETTRES
DE MONTALEMBERT
À
LA COMTESSE SOPHIE APPONYI[1]

C’est à Éphem (Brabant), près de Bruxelles, que, le printemps dernier, j’eus le plaisir de faire la connaissance de la comtesse François Grünne, née Madeleine de Montalembert, entourée de sa belle et nombreuse famille, et que j’ai trouvé beaucoup de souvenirs de son illustre père, dont ma belle-mère m’avait si souvent parlé. J’étais moi-même, depuis ma première jeunesse, admiratrice enthousiaste de l’auteur des Moines d’Occident et de Sainte Élisabeth de Hongrie. J’ai été tout émue de trouver à Éphem tant de souvenirs de lui.

Les dessins que sa fille, Catherine de Montalembert, avait faits de « La Roche, » château qu’il habitait et qui lui était si cher, m’intéressèrent surtout. Aussi, en contemplant les dessins de « La Roche, » ma pensée se reporta-t-elle tout naturellement vers Appony[2], château dans lequel s’écoula la vie de celle que M. de Montalembert avait honorée de son amitié.

  1. La comtesse Sophie Apponyi était née comtesse Sztaray ; son père était le comte Albert Sztaray, sa mère était la comtesse Marie Karolyi ; elle était veuve du comte Jules Apponyi, fils du comte Antoine Apponyi, ambassadeur à Paris de 1824 à 1848, et de la comtesse Thérèse Nogarola.
  2. La famille, qui porte le même nom, est issue de la tribu (souche ou gens) « Pécz, » laquelle, entrée en Hongrie avec Arpad, s’était fixée dans le comitat de « Gyor. » Au commencement du xiiie siècle, les membres de cette tribu possédaient des propriétés considérables dons diverses parties du royaume et étaient investis des charges et dignités les plus élevées ; l’un d’eux, nommé Pierre, fit entrer dans sa famille le domaine des Cseklészpar son mariage avec l’héritière de ce domaine. En 1392, par un contrat passé avec le roi Sigismond de Luxembourg, Pierre échangea Cseklész contre le château fort, les forêts et les domaines d’Appony où les rois de Hongrie habitaient dans le temps pour y chasser (et en adopta quelques années plus tard le nom Apponyi, que sa descendance a conservé jusqu’à nos jours.