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promesses que faisait le parti radical-socialiste avant d’arriver au pouvoir, avec les minces résultats qu’on a pu constater après. Au moment même où le ministère a été constitué, ses amis criaient bien haut : — Enfin, on va voir ce qu’est la vraie politique républicaine, faite par de vrais républicains, sans compromission avec personne, sans autre souci que le triomphe de l’idée ! — Naturellement tout le monde a ouvert les oreilles et les yeux : on a entendu la plus fade des déclarations ministérielles et on n’a vu encore aucun changement appréciable dans la politique courante, si ce n’est qu’elle est plus mal faite. Le nouveau gouvernement a annoncé qu’il appliquerait la loi militaire ; le lendemain, il a fait voter l’augmentation des soldes ; le surlendemain, il s’est préoccupé de la loi électorale, — il l’a bien fallu ! — et il a promis de chercher un terrain de conciliation entre les deux Chambres. Où est le changement ? Où sont les miracles promis ? Les amis du ministère se contentent de dire qu’il ne faut pas le croire sur parole et qu’il cache son jeu en attendant son heure. En l’attendant, beaucoup d’entre eux ne se gênent pas pour voter contre lui, après s’être toutefois distribué les rôles de manière à être sûrs de ne pas le renverser. On peut s’amuser de cette comédie et M. Briand ne s’en est pas privé.

Il y a pourtant un domaine où le nouveau ministère entend innover : c’est celui qui appartient en propre à M. Caillaux, le domaine financier. La force politique et parlementaire de M. Caillaux tient surtout à la compétence qu’on lui reconnaît dans les questions de finance : on l’attendait donc là, on se demandait ce qu’il allait faire. Il ne semble pas, jusqu’ici, qu’il ait fait des merveilles. Loin d’être rassérénée, la situation financière apparaît plus grave avec lui qu’avec son prédécesseur. Le déficit budgétaire s’élève, pour l’année prochaine, à environ 800 millions. M. Caillaux, grâce à des compressions qui ressemblent un peu à de la prestidigitation, promet de le réduire à 600 : c’est à peu près le chiffre de M. Dumont. Mais s’il est vrai que le déficit réel soit de 800, on ne nous fera pas croire à une compression capable de le diminuer de 200 : ces 200 millions se retrouveront, à peu de chose près, dans les futurs crédits supplémentaires. Quoi qu’il en soit, M. Caillaux avoue un déficit de 600 millions et il ajoute qu’il ne demandera rien à l’emprunt pour en couvrir une partie. En principe, il a raison : nous sommes l’ennemi des expédiens qui ne durent qu’une année, ou même plusieurs, mais finissent par manquer, et nous n’avons eu aucun goût pour le compte provisionnel que M. Dumont voulait rouvrir. 600 millions à demander