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prit à son compte cet argument de pauvre homme. Alors, quand vint le moment du vote, je fis la déclaration suivante :

M. MAURICE BARRÈS. — Dans l’amendement Landry-Honnorat, il y a du bon et du mauvais. Si mon sous-amendement est écarté, je ne demande pas le renvoi de l’amendement Landry à la Commission du budget (c’eût été l’enterrement pur et simple). Je ne peux me satisfaire de ce qu’on nous propose ; néanmoins, je ne prendrai pas sur moi de voter « contre » et de vous empêcher de faire votre expérience. J’ai marqué quelles étaient les difficultés que je voyais à ce que vous proposez. Je crois que ce sera inopérant ; je fais les plus énergiques objections aux remèdes que vous apportez, et je me réserve de continuer, s’il y a lieu, ma campagne. Ceci dit, je souhaite vivement que l’expérience vous donne raison.


Il y eut sur mon amendement 522 votans qui se partagèrent en 201 pour l’adoption et 311 contre. Le Gouvernement avait déclaré qu’il le repoussait. Puis l’amendement Landry fut mis aux voix et adopté sans scrutin.

C’était tout de même un progrès, et Le Temps du lendemain, 15 mars 1913, pouvait écrire : « M. Barrès n’a pas obtenu complètement gain de cause : il a tout de même gagné la partie. »

Au cours de la semaine, je reçus une lettre que je prie qu’on lise et relise, car une simple lecture n’en épuise pas le comique. Elle m’était écrite par un juriste éminent, M. Armand Lods :


Mon cher confrère, J’ai applaudi au succès que vous venez de remporter. Vous avez pu créer un mouvement en faveur des églises. Malheureusement le texte adopté par la Chambre ne s’occupe pas des édifices religieux qui sont la propriété des associations cultuelles. Cette fois, — une fois n’est pas coutume, — les protestans et les juifs sont oubliés…


Que dites-vous de cette Assemblée qui m’interrompt à chaque mot pour reprocher au Vatican de ne pas vouloir d’associations cultuelles et qui, elle-même, quand arrive le règlement de la question, les oublie !


MAURICE BARRÈS.