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encore : « Nous ferons un gueuleton le Vendredi-Saint et nous irons c… dans la tour[1].

Je me reprocherais de supprimer un seul de ces détails qui eussent fasciné d’admiration le grand Balzac. Quelle peinture il eût tirée de la sombre ignominie où la politique, quand elle est pensée par des âmes basses, précipite les plus charmantes villes de France ! Et que le Gouvernement ne laisse pas sur ces messieurs de la mare stagnante toute la responsabilité. Il la partage avec eux. J’ai entre les mains la suite des dépêches adressées, en date des 20 et 28 janvier, des 3, 4, 8, 10 et 14 février, au ministre des Beaux-Arts, dépêches pressantes et précises qui n’ont pas permis à nos dirigeans d’ignorer que le Conseil municipal de Vendôme poursuivait ses travaux contre toute légalité, dans un monument en instance de classement. « Il faut que cette immonde comédie se termine, disait l’autre soir le Temps ; la honte d’un pareil scandale rejaillit sur nous tous. » Il le faut. Parlons net. Voici le projet d’affiche que j’expédie à Vendôme :

« Accroupis de Vendôme,

« Vous avez décidé de transformer en latrines le clocher de Saint-Martin ;

« Vous avez persisté à travailler à cette transformation, alors que la procédure de classement était commencée, et qu’un avis favorable avait été donné par la Commission des monumens historiques, — ce faisant, vous portiez une atteinte à la loi ;

« Vous avez eu pour complices dans cette illégalité le préfet et le sous-préfet qui vous ont encouragés, approuvés ;

« Votre construction de latrines a un caractère d’une bassesse sans égale, comme l’établissent tous vos propos et notamment le texte infâme que j’ai cité à la Chambre, d’après votre journal le Progrès du Loir-et-Cher : « Nous élevons en terrain bénit un temple au dieu de la digestion. »

« Votre bestialité éclate dans l’histoire des ossemens. Elle éclate encore quand vous allez prendre des pierres tombales pour boucher une fosse d’aisances.

« Tous ces faits sont accablans. Accroupis, faites silence et démolissez rapidement vos latrines. »

Pendant que je rédige avec horreur ces notes, en

  1. Lettre de M. Royau publiée dans l’Écho de Paris, le 20 mars 1913.