partager les éloges reçus avec le malheureux de Grasse, maintenant prisonnier des Anglais après le combat des Saintes où, luttant à trente contre trente-sept, il avait perdu sept vaisseaux dont la Ville-de-Paris (qui eut 400 morts et 600 blessés), tous si endommagés, toutefois, par la plus furieuse résistance que, incendié, échoué ou coulé, pas un ne vit jamais les eaux anglaises. Rochambeau reçut le ruban bleu du Saint-Esprit, le gouvernement de la Picardie et, peu d’années après, le bâton de maréchal de France. La proximité de son gouvernement lui permit deux visites en Angleterre, où son ancien ennemi, l’amiral Hood, le reçut à bras ouverts et où il retrouva son cher La Luzerne devenu ambassadeur à Londres. Les attentions qui lui causèrent le plus de plaisir lui vinrent des officiers de l’armée de Cornwallis. « Ils manquèrent, écrit-il, par les démonstrations les plus publiques, leur reconnaissance pour l’humanité avec laquelle ils avaient été traités par l’armée française après leur reddition. »
Il entretenait avec Washington une affectueuse correspondance, pour partie inédite, le grand Américain lui rappelant souvent « son amitié et sa tendresse pour ses compagnons de guerre, » discutant un projet de visite en France, décrivant sa vie remplie maintenant « par des occupations champêtres et la contemplation de ces amitiés que la Révolution (américaine) m’a permis de former avec tant de dignes personnages de votre nation. C’est grâce à leur assistance que je peux vivre en repos maintenant dans ma calme retraite. » Rêvant d’une humanité moins agitée que celle qu’il avait connue, rêvant des rêves dont l’accomplissement n’était pas prochain, il écrivait encore à Rochambeau, de Mount-Vernon, le 7 septembre 1785 : « Bien que ce soit contre la profession des armes, je souhaite voir le monde entier en paix. » Au moment de quitter l’Amérique à son tour, La Luzerne avait écrit à Vergennes : « Washington aura beau vouloir se cacher et vivre en simple particulier, il sera toujours le premier citoyen des Etats-Unis. » Il le devint, en effet, de droit comme de fait quand une élection unanime fit de lui le premier président de la République américaine, l’année même où s’ouvraient en France les Etats généraux et où commençait notre Révolution.
Connaissant les dispositions amicales gardées par Rochambeau pour les Américains, Washington donnait volontiers