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montré, de favoriser la dégénérescence de nos organes nobles. M. Metchnikoff et ses élèves ont soigneusement dénombré et étudié ces poisons parmi lesquels il faut signaler le phénol et l’indol. Puis M. Metchnikoff eut l’idée de combattre l’influence des microbes pernicieux qui produisent ces poisons en introduisant dans le tube digestif d’autres microbes inoffensifs et domestiques dont le développement gène celui des premiers. On avait remarqué que les fermentations nuisibles de l’intestin ne se produisent qu’en milieu alcalin ; il fallait donc y réaliser un milieu acide ; M. Metchnikoff y est parvenu en introduisant dans l’intestin sous des formes diverses (lait caillé, etc.) des microbes qui produisent la fermentation lactique, laquelle est acide. Un grand nombre d’états pathologiques et de troubles divers sont justiciables de cette méthode qui a déjà donné de beaux résultats.

Quant à la question de savoir si cette théorie profondément ingénieuse et originale de la sénescence prématurée pourra dans la pratique arriver à supprimer la vieillesse, elle n’est pas encore résolue, et il est permis d’être sceptique à son sujet. Mais qu’importe, si du moins M. Metchnikoff nous a donné le moyen de rendre plus supportable et même de retarder « des ans l’irréparable outrage ? » et ceci n’est guère douteux. Il y a d’ailleurs une expérience sans doute non impossible à réaliser, que nous nous permettons de suggérer et qui fournirait un critérium décisif de cette théorie de la sénescence : elle consisterait à prolonger suffisamment longtemps l’élevage stérilisé des petits animaux, et à voir s’ils vieillissent moins vite, toutes choses égales d’ailleurs, que leurs congénères.

L’étude de la flore intestinale a aussi conduit M. Metchnikoff à y déceler une bactérie très répandue, le B. proteus, auquel il attribue une des affections les plus terribles de l’enfance, le choléra infantile qui, pendant les étés, enlève les nourrissons par milliers. On trouve beaucoup de ces bactéries dans l’intestin des petits malades et avec leur culture on a pu produire chez les animaux une affection semblable. Cela nous donne des indications précieuses sur les moyens à prendre contre la diarrhée des nourrissons.


A l’autre pôle de ces recherches qui ont toutes à l’origine les travaux de M. Metchnikoff sur l’immunité, il faut situer l’étude d’un phénomène presque antagoniste de celle-ci, et qu’on nomme l’anaphylaxie, étude à laquelle l’Institut Pasteur a apporté récemment des contributions importantes. On sait par le bel exposé que lui a consacré