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AU BORD DE L’EAU


— Étang de nacre et de jade,
De topaze et de béryl ;
Étang grave et puéril,
Indifférent et maussade ;

Pâle et luisant à la fois
De multiples influences,
Étang, j’ai dans vos nuances,
Un à un, plongé mes doigts.

Les froids baisers de votre onde
Me pénètrent lentement…
O fluide diamant,
Caresse chaste et profonde !

O douceur, ô volupté
Merveilleuse et délicate ;
Reflets de perle ou d’agate,
De l’eau morte et de l’été !…




L’heure est chaude, pesante, moite…
Des nymphéas à demi clos
Dorment sur l’étang qui miroite…
Je suis couchée au bord de l’eau.

Dans sa dédaigneuse indolence
Un cygne me frôle en passant…
— Prescience intime, silence
Inquiet, obscur et puissant !

L’orage est proche… Des corolles
Inclinent leurs fronts courbatus ;
Dans les saules aux branches molles,
Soudain les oiseaux se sont tus ;