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Page:Revue des Deux Mondes - 1914 - tome 20.djvu/401

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Lorsque la récolte y est faite, les productions de la partie supérieure à la colline et la plus haute de tout le pays, touchent à la maturité. Ainsi, quand les fruits donnés par les deux premières récoltes ont été consommés, ceux de la dernière région viennent les suppléer. La récolte en Cyrénaïque se prolonge donc pendant huit mois. » Pline ajoute sur la nature même des récoltes par zones une série d’indications précieuses. « Le territoire de la Cyrénaïque, dans une largeur de 15 000 pas à partir du rivage, est riche en arbres ; la zone suivante, d’une même largeur, ne produit que des grains ; enfin la dernière zone, de 30 000 pas de large sur 250 000 de long, est celle du silphium. »

La mer apportait aussi sa contribution à la prospérité générale. Le poisson, les éponges, le corail abondaient sur la côte de Cyrénaïque, comme aujourd’hui encore tout le long du littoral méditerranéen.

Ces produits si variés donnaient lieu à un grand mouvement d’échanges avec le dehors. La laine, le cuir, l’huile, le miel, l’essence de rose s’exportaient en Crète, en Egypte et en Grèce.

Les ports de Cyrénaïque, Euhespérides, Tauchira, surtout Apollonie, le port de Cyrène, reliée à la capitale par une chaussée de douze kilomètres, s’enrichissaient par le trafic. Cyrène, admirablement placée au centre de la région agricole, directement mêlée au commerce maritime par son port d’Apollonie, était célèbre pour son opulence. « Le plus pauvre des Cyrénéens, dit un auteur ancien, porte au doigt un anneau de dix mines. »

Le développement intellectuel marcha de pair avec les progrès du bien-être. L’art, les sciences, les lettres y prirent un merveilleux essor. Cyrène eut ses philosophes, Aristippe, le grand théoricien du plaisir, et le sceptique Carnéade ; ses poètes et ses savans, Callimaque et Eratosthène ; ses médecins, ses architectes et ses sculpteurs ; enfin ses graveurs sur pierres fines, qui acquirent dans le monde ancien une renommée universelle.

Les luttes intestines ont toujours été un mal chronique dans le monde grec. Cyrène, après tant d’autres, devait en faire la triste expérience. Pendant cent cinquante ans, aristocrates et démocrates, riches et pauvres, sont constamment aux prises, et