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Page:Revue des Deux Mondes - 1914 - tome 20.djvu/408

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la limite traditionnelle, les autels des Philènes, ne fut pas modifiée ; à l’Ouest, du côté de la Numidie, la frontière de la nouvelle province fut fixée au Nord du lac Triton, le Chott el Djérid actuel. La province romaine de Tripolitaine débordait donc considérablement vers le Nord le territoire de la Tripolitaine moderne. Toute la partie méridionale de notre Tunisie, du Chott el Djérid et du golfe de Gabès à l’Oued el Mokta avec l’île de Meninx (Djerba), s’y trouvait ainsi rattachée.

En Cyrénaïque, les mêmes préoccupations d’administration sérieuse, qui sont une des caractéristiques essentielles du régime impérial, déterminèrent Dioclétien à une mesure analogue. L’amalgame complexe de la province Créto-Cyrénéenne fut brisé. La Cyrénaïque fut détachée de la Grète et, par surcroit de précaution, divisée elle-même en deux provinces indépendantes : la Libye supérieure, l’ancienne Cyrénaïque proprement dite, à l’Ouest ; la Libye inférieure, comprenant la Marmarique et les régions limitrophes de l’Egypte, à l’Est. Les nouvelles provinces, — la Tripolitaine et les deux Libyes, — furent administrées d’une manière uniforme. A leur tête furent placés des gouverneurs, praesides, revêtus du pouvoir civil et judiciaire ; le commandement militaire appartint désormais à des officiers de métier, les ducs.

Le morcellement de l’Etat romain en Empire d’Orient et Empire d’Occident, qui fut, pour ainsi dire permanent, depuis le milieu du IVe siècle, vint encore exagérer la division traditionnelle de la Tripolitaine et de la Cyrénaïque. La première fut rattachée à l’Empire d’Occident, la seconde à l’Empire d’Orient, et la frontière séculaire, jalonnée par les monumens des Philènes, devint une limite mondiale qui allait séparer désormais les deux grands empires méditerranéens.

La question militaire, en Tripolitaine et en Cyrénaïque, est toujours restée au premier plan des préoccupations romaines. La prise de possession du pays avait été particulièrement facile. On a vu Leptis demander spontanément une garnison romaine et, à Cyrène, le Sénat n’avait eu que la peine de recueillir un testament opportun.

Les véritables difficultés devaient commencer plus tard ; les Romains d’autrefois ont pu s’apercevoir, que, s’il était aisé de prendre pied en Afrique, il était beaucoup plus délicat de s’y maintenir. Nulle part le fait ne s’est mieux vérifié qu’en