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Page:Revue des Deux Mondes - 1914 - tome 20.djvu/457

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Parsifal anglais. Il les éconduit, en termes discourtois et prétentieux tout ensemble :


Non, ce n’est rien d’avoir un petit nez joli,
Rien d’être rousse, ou brune, ou blonde,
Rien d’avoir des minceurs qui tremblent dans des plis
Rien d’avoir un front pâle ou des poignets pâlis :
Le tout, c’est d’avoir une âme profonde.


Derrière les rameaux étincelans, il a bientôt fait de la découvrir, cette âme-là, que le corps frêle d’une enfant enveloppe. Et voici les aveux, et voici les sermens, et voici les baisers. Non ! le baiser unique, et qui brise le charme. Déjà les bougies de Noël achèvent de se consumer, leur petites flammes vacillent et le rêve, lumineux comme elles, avec elles s’éteint.

Acte troisième et dernier. Même décor qu’au premier acte, plus neigeux seulement, et matinal. Daisy, que le blanc linceul a presque toute recouverte, dort toujours, d’un sommeil semblable à la mort, et d’où la mort bientôt va s’ensuivre. Mais la mort même aura pour Daisy quelque douceur, une douceur où se mêleront jusqu’à la fin le réel et le rêve. C’est peut-être ici que le mélange est le plus agréable. Entre les deux élémens, l’équivoque est bien ménagée, gardée avec mesure, et, si l’on peut dire, filée avec délicatesse. Revenu dès l’aube sur la place, le bon joueur d’orgue retrouve sa petite camarade. Il la réveille, la réchauffe et la ranime pour quelques instans. Et voici que vient à passer, pour de vrai, cette fois, le joli marin, qui regagne son bord et reprend la mer. Appelé par le vieux mendiant au secours de la pauvrette, il s’arrête, il s’attarde, seulement ému d’abord, puis troublé vaguement. Cette dernière scène est un peu longue, incertaine aussi, mais à dessein, le charme en étant fait de cette incertitude même, de sous-entendus, de réminiscences flottantes et de mystérieux soupçons.


Ah ! que la vie est donc une bizarre chose !
Je passais, je partais, une enfant va mourir :
Je ne la connais pas, je lui donne une rose,
Et voici qu’à présent je ne peux plus partir.


Il partira cependant, mais d’abord il aura mis une fleur dans les doigts, un baiser sur le front de cette enfant, qui le reconnaît sans qu’il la connaisse, qui rêva de lui sans qu’il le sache, et qu’il regarde mourir.

Maintenant, pour parler de la musique, il nous reste peu de place. Il n’en faut pas davantage. Ce qui manque le moins à M. Tiarko