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Page:Revue des Deux Mondes - 1914 - tome 20.djvu/703

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l’épidémie de peste bubonique qui sévissait alors à Hong-Kong, C’est également M. Yersin, aujourd’hui directeur des Instituts Pasteur de Saigon et de Nha-Trang, qui mit en évidence le rôle des rats dans la propagation de cette affection. C’est encore un pastorien, le docteur Simond, lors d’une mission dont il avait été chargé dans l’Inde par l’Institut Pasteur, qui apporta une clarté complète dans l’étiologie de la peste en prouvant que les puces du rat sont les agens qui transmettent la maladie de ce rongeur à l’homme. La Commission anglaise de la peste a confirmé pleinement ces faits d’où découlent à la fois une prophylaxie et une thérapeutique réalisées par les méthodes pastoriennes habituelles.

Le sérum antipesteux, fabriqué en immunisant progressivement, au moyen de cultures de bacilles de Yersin, les chevaux destinés à fournir le sérum, a été préparé pour la première fois par M. Yersin, M. Roux et ses collaborateurs MM. Calmette et Borrel. Il constitue le seul remède spécifique et efficace de la peste.

Mais il faut qu’il soit employé pour cela largement, et dès le début de la maladie. Il donne alors des résultats remarquables. On en a apporté de nombreuses démonstrations, et notamment MM. Calmette et Salimbéni, lors de l’épidémie d’Oporto. L’efficacité du sérum est d’autant moindre qu’il est employé plus tardivement : ainsi en 1898 (époque où les sérums préparés étaient d’ailleurs moins actifs qu’aujourd’hui), M. Simond a constaté que, chez les Hindous traités par lui, ceux qui reçoivent le sérum le premier jour ne donnent qu’une mortalité de 20 pour 100 ; s’ils l’ont reçu au troisième jour, elle monte à 36 pour 100, à 66 pour 100 au quatrième, et la proportion des morts s’élève à 100 pour 100 parmi les traités au cinquième jour. Les malades étant en général rebelles à l’hospitalisation, et se tenant à l’abri des recherches, on conçoit que dans l’Inde par exemple la mortalité pesteuse soit encore très grande. Il y meurt encore bon an mal an environ un million de pesteux. Avec la diffusion et la rapidité accrue des moyens de communication, l’existence des grands foyers pesteux endémiques de l’Asie rend toujours redoutable pour nous une invasion foudroyante de ce fléau dont La Fontaine croyait naïvement qu’il avait été inventé par le ciel « pour punir les crimes de la Terre... » Comme si l’Inde recelait plus de crimes que nos régions dites civilisées !

A cet égard, rien n’est plus important que la prophylaxie de la peste. Elle a fait de grands progrès grâce aux vaccinations antipesteuses. Celles-ci complètent le rôle du sérum qui, s’il guérit souvent, ne fournit