Aller au contenu

Page:Revue des Deux Mondes - 1914 - tome 20.djvu/781

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

plus entièrement à l’accroissement de ses collections, en associant à ses recherches l’artiste, déjà célèbre, qu’il allait épouser l’année suivante.

La crise de l’Union n’était point imprévue. Déjà en 1872, lors de sa reconstitution, ses membres les plus actifs avaient dû reconnaître l’insuffisance de leurs ressources pour acquérir et installer à la place Royale, à côté des salles de bibliothèque et de conférences, la quantité et la multiplicité d’objets d’art originaux nécessaires pour constituer un ensemble de modèles vraiment exemplaires et instructifs. C’est pourquoi, en 1877, deux de ses associés les plus ardens, le jeune duc de Chaulnes, héritier par le sang et par les nobles goûts, de l’illustre amateur le duc de Luynes, et le savant marquis de Chennevières, directeur des Beaux-Arts, s’étaient mis en tête de venir à son secours. Ils avaient donc fondé le Musée des Arts décoratifs qui, en moins de quatre ans, grâce au concours empressé de nombreux donateurs, s’était déjà constitué un fonds important d’œuvres anciennes et modernes. Ils n’avaient pu, toutefois, se créer des ressources suffisantes pour l’avenir lorsqu’en 1881 les événemens politiques précipitèrent le dénouement fatal. Malgré la résistance et la protestation d’une minorité indépendante, il fallut avoir recours à l’État, l’État souverain, providentiel, le sauveur infaillible, éternel, de droit divin, suivant un dogme plus cher encore à la démagogie socialiste qu’à la monarchie aristocratique, parce qu’elle est aussi autoritaire et qu’elle se sent moins responsable.

Le négociateur de cette fusion des deux Sociétés et de leur absorption, sinon immédiate, au moins future, par l’Etat, fut Antonin Proust, ministre des Arts, en 1881. Ces deux Sociétés, réunies sous le titre de l’Union Centrale des Arts décoratifs, obtinrent, pour prix de leur indépendance perdue, avec la reconnaissance d’utilité publique, l’autorisation d’émettre, à leur profit, des billets de loterie pour une somme de quatorze millions. La liquidation de cette vaste opération ne s’exécuta pas, tout le monde le sait, sans lenteurs et sans difficultés, et se réduisit, pour l’Union, à l’encaissement de 5 millions 812 000 francs.

C’était encore de trop pauvres ressources pour suffire à la double tâche d’une installation d’École pratique des Arts appliqués dans les centres industriels, et d’un Musée national des Arts décoratifs, digne de Paris et de la France, et pouvant rivaliser