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Page:Revue des Deux Mondes - 1914 - tome 20.djvu/792

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faciles et rapides ? D’autre part, pour des amateurs éclairés par les voyages, les comparaisons, les lectures, mieux ouverts à l’intelligence sympathique de toutes les formes de la beauté en tout pays et en tout temps, quelle halte plus instructive à faire qu’en cette floraison, à la fois si printanière et déjà si glorieuse, de la première Renaissance italienne ? Ici comme là, n’est-ce point même sensibilité d’imagination, même mobilité dans la fantaisie, même franchise dans la vision de la réalité élégante ou familière, même souplesse obéissante aux nécessités ou invitations de l’entourage ornemental, même application d’une technique attentive à l’expression de sa pensée, dans les objets les plus minimes de la toilette et de l’ameublement, aussi bien que dans les grands cartons pour fresques ou pour tapisseries monumentales, ou magnifiques ensembles de décor sculptural ? Et, des deux côtés, chez les artistes eux-mêmes, dans leurs vies, leurs habitudes, leurs études, leurs intelligences, que de conformités ! Malgré les dominations, plus apparentes que réelles, du pédantisme humaniste chez les Médicis, les Gonzagues, les Sforza, etc., et du formalisme académique à la cour de Versailles, n’est-ce pas la même indépendance d’esprit, la même bonhomie, simplicité, cordialité dans leurs rapports avec leurs protecteurs, confrères, parens, élèves ? Les uns et les autres sont de vrais poètes, les premiers encore fidèles à l’idéalisme mystique et héroïque du Moyen âge, les derniers plus aisément satisfaits par le naturalisme des représentations familières ou le sensualisme des rêveries voluptueuses, tous passant volontiers du sacré au profane, de l’Evangile à la mythologie, avec une ardeur, et un dilettantisme d’imagination, qui témoignent chez eux d’une virtuosité sensible à toutes les expressions du beau.

Durant cette période, de 1881 à 1891, pour nos Mécènes, toutes les années ne sont pas aussi fructueuses. Presque toutes se marquent pourtant par quelque série d’acquisitions d’ensemble ou de morceaux qui témoignent d’un esprit de suite réfléchi. Les petites curiosités de vitrines s’accumulent rapidement au hasard de l’offre et de la trouvaille autant que les grandes pièces nécessaires à l’organisation décorative des divers étages : lambris, portes, plafonds, tapisseries, sculptures, peintures, meubles, etc.

Vers 1888-1889, il y a déjà, dans la maison, assez de beaux morceaux pour que la visite des appartemens soit désirée par