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Page:Revue des Deux Mondes - 1914 - tome 20.djvu/834

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de ne pas quitter son cher catéchisme. Je note en passant qu’il accepta cependant d’être second aumônier de la Duchesse d’Angoulême et catéchiste du Duc de Bordeaux, ce qui fit qu’après la Révolution de Juillet, il dépendit de lui de quitter Paris pour suivre le petit prince dans l’exil ; mais il préféra rester à la Madeleine. Bientôt après, on venait lui demander de remplir auprès du Duc de Nemours, second fils de Louis-Philippe, la fonction qu’il avait remplie auprès du petit-fils de Charles X. Il l’accepta sans hésiter, car elle ne le détachait pas de l’œuvre à laquelle il s’était consacré depuis 1825.

A ce propos, M. Emile Faguet nous rappelle un trait où nous trouvons la preuve de la hauteur de vues, de l’éloquence et de l’érudition que l’abbé Dupanloup apportait dans son enseignement et qui captivait ses auditeurs : « Le Duc de Nemours avait pour précepteur un vieux voltairien, M. Trognon, ancien professeur de l’Université impériale. La première fois que l’abbé Dupanloup vint catéchiser le Duc de Nemours, M. Trognon lut son journal pendant toute la leçon ; la seconde fois, il interrompit souvent sa lecture ; la troisième fois, il mit son journal dans sa poche ; la quatrième fois, il ne l’apporta plus. » Il avait, lui aussi, en dépit de ses opinions antireligieuses, subi le charme qu’exerçait, partout où elle se faisait entendre, la parole du catéchiste.

Par ce qui précède, on peut mesurer la place considérable que, à peine âgé de trente-deux ans, le futur évêque d’Orléans occupait déjà parmi le clergé de Paris. Ce n’est pas cependant qu’il n’y comptât que des partisans. Quoique tout le monde rendît hommage à la dignité de sa vie, à ses vertus de prêtre, à l’étendue de ses connaissances classiques et enfin à l’action qu’il exerçait sut les âmes, des critiques avaient été formulées contre ce qu’on appelait « le caractère trop mondain » de son enseignement. C’est ici le cas de rappeler que des critiques analogues devaient, bientôt après, se faire entendre contre la prédication de Lacordaire et que, même de nos jours, lorsqu’il y a vingt ans, un autre moine dominicain, le P. Didon, prêcha sur le divorce, elles se renouvelèrent. A celui-ci on objectait, non sans raison, qu’il est des questions que peut-être il ne convient pas de traiter dans la chaire et auxquelles la tribune du forum convient mieux. On sait d’ailleurs quel empressement il mit à se rendre aux remontrances qui lui étaient adressées, et on n’a