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parvenu à chasser ce malheureux roi, mais, loin de diminuer les impôts, on les a augmentés. »

Ce sont là de bonnes leçons pour les peuples qui auraient envie de faire des révolutions, et j’aime entendre ces vérités, de la part de révolutionnaires tels que Laffîtte et Thiers, dont l’un a éprouvé bien des mécomptes et dont l’autre, tout au contraire, est parvenu au pouvoir, à la puissance la plus grande, sous un gouvernement qui n’est pas une République.

Thiers, dans sa réplique, a été très adroit, très spirituel : on lui a rendu justice sous ce rapport. Il a montré le talent et l’adresse d’un avocat très habile, qui défend une mauvaise cause ; on a beaucoup, admiré son adresse, mais il n’a persuadé personne. Laffitle n’avait rien dit, ces dernières années, par la raison que ses affaires de fortune l’absorbaient entièrement et qu’il avait trop de personnes à ménager pour pouvoir attaquer le gouvernement. Aujourd’hui, sa position a changé, il est de nouveau indépendant, à la tête d’une fortune de cent vingt mille livres de rentes, il parle, par conséquent, et il parlera à la prochaine session bien plus encore. C’est un homme vain et vindicatif ; il a du talent, et ses antécédens le rendent redoutable au gouvernement de Juillet.


25 juin. — Je viens du cercle diplomatique qui a eu lieu chez le roi et la reine des Belges. La Reine a meilleure mine que la dernière fois que je l’ai vue ; elle est bonne et douce, avec une grande envie de plaire. Sa Majesté m’a dit qu’elle était en plein bonheur de pouvoir passer quelque temps avec ses parens, ses frères et ses sœurs. Sa Majesté le roi Léopold est toujours le même, très solennel et très ennuyeux.

Leurs Majestés nous ont reçus dans l’ancien appartement du Duc de Bordeaux ; je n’avais pas revu cette chambre depuis la fête que Mme la Duchesse de Berry y a donnée pour Sa Majesté le roi de Naples. Par un hasard singulier, l’Ambassadeur et moi nous sommes trouvés debout pendant le cercle, à la place où, en 1830, j’ai dansé avec Mme la Duchesse de Berry le dernier cotillon qu’elle ait dansé dans ce palais.


25 au soir. — Je viens d’apprendre qu’un attentat contre la vie du Roi a été commis, entre cinq et six heures après midi, sous le guichet des Tuileries, du côté de la Seine. L’individu