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serait inférieure à la Triple Alliance. Si nous parlons de cette question d’alliance et d’entente, c’est parce que la presse britannique a tenu, pendant les fêtes de Paris, à mettre l’opinion en garde contre des espérances qui ne pourraient pas se réaliser : mais nous savions fort bien à quoi nous en tenir à ce sujet, et il n’a jamais été dans notre pensée de rien demander au-delà de ce qui existe déjà. Tout ce qu’il serait exact de dire, c’est que, à nos yeux, les biens entre l’Angleterre, la Russie et la France ne sauraient jamais être trop étroits.

Quant à la visite royale, il ne peut en résulter autre chose que des sentimens encore plus cordiaux entre les deux gouvernemens et les deux pays, mais ce n’est pas là un résultat négligeable. Il est bon de se voir de près pour se bien connaître, et nous avons la prétention de gagner à être connus. Nous avons nos faiblesses sans doute ; qui n’a pas les siennes ? Les nôtres, — que nous cachons si peu nous-mêmes ! — sont exploitées par ceux qui ont intérêt à le faire et qui les grossissent au point de les dénaturer. On nous ferait volontiers passer pour un pays tombé dans l’anarchie : les souverains anglais ont pu voir combien ce portrait était peu ressemblant. Aucune ville au monde ne pourrait donner un spectacle plus réconfortant que celui qu’a donné Paris, où, pendant trois jours, une foule immense, gaie, joyeuse, heureuse, a manifesté dans un ordre parfait. Le Roi et la Reine ont bien voulu dire qu’ils conserveraient le souvenir de la réception qui leur a été faite : ils ont pu voir que la France était sensible à l’amitié qu’on lui témoigne et qu’elle aussi en garde le souvenir.


Si le vieux continent est en paix, peut-on en dire autant du nouveau ? Le canon a tonné à Vera Cruz et un détachement de troupes des États-Unis s’est emparé de la ville. Était-ce la guerre ? Le président Wilson se refusait à le croire. En tout cas, c’était bien un acte de guerre et les conséquences, avec les répercussions qu’elles pouvaient avoir, menaçaient d’être infiniment graves. Heureusement, une intervention opportune paraît avoir conjuré le danger immédiat. Mais, pour bien comprendre la situation présente, quelques explications rétrospectives sont nécessaires.

Le conflit qui vient de provoquer cet éclat violent se poursuit depuis assez longtemps déjà entre les États-Unis et le Mexique, et si nous n’en avons pas encore parlé, ce n’est pas que nous n’en ayons pas senti l’importance ; mais d’autres affaires, qui n’en avaient pas moins et qui étaient plus près de nous, s’imposaient davantage à notre