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Page:Revue des Deux Mondes - 1914 - tome 21.djvu/654

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De là résulte la valeur de l’enseignement oral qui oblige d’ailleurs l’élève à interroger, le maître à exposer et à répondre clairement. La première conséquence, c’est que toute la puissance de la sagesse brille ou doit briller dans le Studium, l’Université ou l’Ecole ; c’est que sa beauté, sa grandeur, son utilité apparaissent dans les exercices de la discipline scolastique, avant de se montrer dans la direction de l’Eglise et de la république des fidèles, dans la conversion des infidèles et dans la répression de ceux qui ne peuvent être convertis. La seconde, c’est que, si les écoles des réguliers et des séculiers négligent ce qui est le plus précieux de la sagesse, le Pape doit intervenir pour y remettre l’ordre en instaurant l’enseignement qui convient.

Ainsi Roger Bacon a pris, dans les écoles, l’habitude des exercices auxquels on s’y livre. Mais, au lieu de ne leur laisser qu’une valeur verbale et purement scolaire, comme on fit souvent par la suite, il les a complétés et perfectionnés ; il a voulu qu’ils devinssent le meilleur des moyens par lesquels on peut sinon augmenter, du moins transmettre la sagesse.

De même si les maîtres, au sens large du mot, ne lui ont pas manqué, c’est qu’il a su les chercher. Il a fait tout ce qu’il fallait pour entrer en relations avec les contemporains comme pour se procurer les œuvres de ses prédécesseurs. Et cela, dès sa jeunesse, ce qui lui a permis de se renseigner admirablement. Il a appris, d’hommes d’une grande simplicité et qui n’ont aucun nom dans les écoles, plus de choses utiles, que de ses maîtres fameux. Il sait que beaucoup de Latins travaillent sur les métaux et les couleurs, mais que très peu fabriquent vraiment et utilement les couleurs, que presque aucun ne fait les métaux, que fort peu connaissent les travaux propres à la prolongation de la vie, que peu même savent bien distiller, sublimer, calciner, résoudre et faire les opérations par lesquelles on arrive à la connaissance assurée des choses inanimées et à la certitude en alchimie spéculative, en philosophie naturelle, en médecine ; il n’y en a pas trois qui aient travaillé pour savoir ce qu’est l’alchimie spéculative, c’est-à-dire ce qu’enseignent, en dehors de l’expérience, les auteurs et les livres ; un seul, le maître des expériences, est puissant et très habile dans la science double qu’est l’alchimie. S’agit-il des mathématiques ? Deux hommes seuls les possèdent parfaitement, Jean de Londres et Pierre de