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Page:Revue des Deux Mondes - 1914 - tome 21.djvu/695

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reconnaître au moyen du spectrohéliographe quelle est la répartition en hauteur d’un élément chimique donné, sa distribution dans les diverses couches de l’atmosphère solaire projetée sur le disque. C’est un résultat admirable, et ici encore la physique du Soleil est en avance sur celle de notre globe, puisque nous n’avons aucun moyen actuel de connaître par une simple opération optique la composition des diverses couches de notre atmosphère suivant la verticale.

Voici comment on arrive à ce résultat dans le cas du Soleil. Lorsqu’on dirige pendant une éclipse la fente d’un spectroscope ordinaire radialement au bord d’une image solaire, c’est-à-dire perpendiculairement à ce bord, on constate que les raies du spectre du bord n’ont pas un aspect identique suivant qu’elles proviennent de son voisinage immédiat ou d’une région un peu plus éloignée. Par exemple, les raies bien connues du calcium, à et à (on sait que Frauenhofer a baptisé les principales raies noires découvertes par lui dans le spectre solaire au moyen des lettres de l’alphabet), ont le caractère suivant : tout près du bord solaire la raie est très large, puis, à mesure qu’on s’éloigne du bord vers l’extérieur du Soleil, son épaisseur diminue, et elle va en s’effilant de plus en plus. On pouvait s’attendre à ce résultat puisque, d’après ce que nous avons vu, la pression augmente la largeur des raies spectrales, et que la pression doit forcément diminuer à mesure qu’on s’élève dans l’atmosphère solaire. Mais ce n’est pas tout : ces raies qui sont brillantes dans l’atmosphère solaire vue pendant une éclipse le sont également en temps normal en leur partie centrale au-dessus des facules du disque, comme MM. Deslandres et Hale l’ont reconnu en 1891.

C’est au moyen de cette partie centrale brillante des raies à et à du calcium qu’ont été faits par ces inventeurs les premiers spectrohéliogrammes. Puis ils n’ont pas tardé à reconnaître qu’il n’était pas nécessaire que les raies du spectre fussent brillantes pour qu’on pût obtenir avec elles des photographies de l’atmosphère du soleil : les raies noires du spectre solaire ne sont obscures que relativement à l’éclat éblouissant du fond continu du spectre sur lequel elles se détachent. En réalité, leur partie la plus noire émet encore une lumière très notable. C’est ainsi que M. Deslandres le premier a réussi à obtenir des images solaires produites par des raies noires du spectre, soigneusement isolées au moyen des fentes du spectrohéliographe.

Dans ces conditions, ce n’est plus qu’un jeu de photographier par exemple la répartition des vapeurs de calcium dans les diverses couches qui entourent le Soleil : pour avoir cette répartition dans les