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leur entreprise et il leur a promis d’opérer de nouvelles recherches dans la bibliothèque du Vatican pour tâcher d’y découvrir des œuvres encore inédites. Mais un speech plus curieux encore a été celui d’un Franciscain, assis avec nous à la table d’honneur et remplaçant à l’improviste le Révérend professeur Pascal Robinson, délégué des Frères Mineurs, — il était ainsi ‘qualifié sur le menu des toasts, — qui, en fort bons termes également, a remercié de l’honneur fait à son ordre. Le dirai-je cependant ? en écoutant ces deux discours, j’ai eu une impression pénible, car je me suis dit qu’ils n’auraient pas pu être prononcés en France. La France ignore le Saint-Siège ; la France’ a proscrit les Franciscains comme les autres ordres religieux, et il faut venir en Angleterre pour voir le Saint-Siège et les Franciscains traités comme ils devraient l’être partout. Oh ! que ces Anglais, qui ont dépouillé les catholiques, — car le collège où nous sommes appartenait autrefois à un ordre religieux, — qui les ont si longtemps persécutés et tenus à l’écart de la vie publique, puisque l’émancipation des catholiques ne date que de 1829, nous donnent aujourd’hui, en ce qui les concerne, d’utiles leçons de tolérance.

La fête n’était pas terminée cependant. Elle devait se clore par un garden party dans le jardin de Wadham College. Ces jardins des collèges sont une des beautés d’Oxford. Je suis persuadé que les professeurs à la Sorbonne ou au Collège de France qui ont l’occasion de les visiter doivent envier la condition de leurs confrères d’outre-Manche, à moins cependant qu’ils ne considèrent Paris comme le plus beau jardin du monde. Celui de Wadham College est le plus beau d’Oxford. Il est planté d’arbres rares qu’on nous fait remarquer et ses vertes pelouses sont admirablement bien tenues. Sur ces pelouses se promènent quelques femmes mais en beaucoup plus grand nombre des professeurs, des docteurs, des masters of arts, quelques bacheliers en petit nombre revêtus de robes de couleurs variées, les unes grises, les autres noires, avec de grands collets rabattus, rouges ou violets. On m’explique ce que chacun de ces uniformes veut dire, mais je craindrais de me tromper, si je voulais préciser. Le plus seyant et aussi le moins porté m’a paru être celui des bacheliers : une robe noire avec un large col, en soie bleue, formant presque pèlerine et bordé de fourrure blanche. On dirait un boa de dame. Mais puisque je me suis